Le Rebouteux
Je n’irai pas dans son repaire,
Je manquerai son rendez-vous,
Car on le dit meneur de loups,
Et grand ami de la vipère.
— Son empirisme qui prospère
Rend plus d’un médecin jaloux !
Je n’irai pas dans son repaire,
Je manquerai son rendez-vous.
Il guérit tous ceux qu’il opère,
Remet bras, jambes et genoux ;
Mais, comme je crois, entre nous,
Qu’il a le diable pour compère,
Je n’irai pas dans son repaire !
poésie de Maurice Rollinat
Ajouté par Poetry Lover
Commentez! | Vote! | Copie!

Mystère
Pourquoi donc rougit la pucelle
En face de l’adolescent ?
Pourquoi ce rire languissant
Et cette allure qui chancelle ?
Qu’est-ce qui mouille l’étincelle
De son beau regard innocent ?
Pourquoi donc rougit la pucelle
En face de l’adolescent ?
Ce vermillon qui la harcèle
Lui vient-il de l’âme ou du sang ?
Est-ce un danger qu’elle pressent ?
Est-ce un désir qu’elle recèle ?
Pourquoi donc rougit la pucelle ?
poésie de Maurice Rollinat
Ajouté par Poetry Lover
Commentez! | Vote! | Copie!

La Petite Gardeuse d'oies
Ma petite gardeuse d’oies,
Par les prés et les chemins creux,
Tu redis ton branle amoureux
Aux buissons verts que tu coudoies.
Tu vas éparpillant tes joies
Sur l’herbe et les talus pierreux,
Ma petite gardeuse d’oies,
Par les prés et les chemins creux ;
Et sans penser qu’un jour leurs foies
Feront des pâtés savoureux,
Tu suis tes gros jars bienheureux,
Car jamais tu ne les rudoies,
Ma petite gardeuse d’oies.
poésie de Maurice Rollinat
Ajouté par Poetry Lover
Commentez! | Vote! | Copie!

Les Deux Petits Frères
Ils s’en reviennent de l’école,
Un livre dans leur petit sac.
— Au loin, on entend le ressac
De la Creuse qui dégringole.
L’aîné rapporte une bricole,
De la chandelle et du tabac.
Ils s’en reviennent de l’école,
Un livre dans leur petit sac.
Mais la nuit vient ; dans sa rigole
La grenouille fait son coac,
Et tous les deux, ayant le trac
Et tirant leur pied qui se colle,
Ils s’en reviennent de l’école.
poésie de Maurice Rollinat
Ajouté par Poetry Lover
Commentez! | Vote! | Copie!

Mes girouettes
Elles grincent, mes girouettes,
Sur le pauvre toit en lambeaux.
Tous les arbres, grands et nabots,
Ont de lugubres silhouettes !
Dans la saison des alouettes,
Quand les cieux dorment sans flambeaux,
Elles grincent mes girouettes
Sur le pauvre toit en lambeaux.
Comme elles font des pirouettes
Dès que les jours ne sont plus beaux !
Le matin, avec les corbeaux,
Et le soir, avec les chouettes,
Elles grincent mes girouettes !
poésie de Maurice Rollinat
Ajouté par Poetry Lover
Commentez! | Vote! | Copie!

Les Pâquerettes
Les pâquerettes sont en deuil
Depuis que Marguerite est morte.
Hélas ! on a fermé la porte
Et sa bière a quitté le seuil.
Elles se miraient dans son œil :
C’était leur âme en quelque sorte !
Les pâquerettes sont en deuil
Depuis que Marguerite est morte.
Chacune, avec un tendre orgueil,
Câline et tristement accorte,
Eût voulu lui servir d’escorte
Et se faner dans son cercueil !
Les pâquerettes sont en deuil.
poésie de Maurice Rollinat
Ajouté par Poetry Lover
Commentez! | Vote! | Copie!

L'Interprète
L’inclinaison de ce vieux saule
Sur le vieil étang soucieux
Que pas une brise ne frôle,
A quelque chose de pieux.
Et l’on dirait que chaque feuille,
Ayant cessé son trémolo,
Pompe le mystère de l’eau
Et dévotement se recueille.
Or, soudain, y perchant son vol,
Voici qu’un petit rossignol,
Tendre interprète d’aventure,
Pour l’arbre adresse à l’Inconnu,
Dans un lamento soutenu,
La prière de la Nature !
poésie de Maurice Rollinat
Ajouté par Poetry Lover
Commentez! | Vote! | Copie!

La Vipère
Pauvre serpent, montre ta tête
Aplatie et triangulaire.
Par ce soleil caniculaire
Dors en paix, formidable bête !
Tu siffles comme une tempête,
Mais j’ai pitié de ta colère.
Pauvre serpent, montre ta tête
Aplatie et triangulaire !
C’est bien doux qu’ici je m’arrête :
Sans te bénir, je te tolère,
Car aujourd’hui l’amour m’éclaire,
Et j’en ai l’âme toute en fête.
Pauvre serpent ! montre ta tête !
poésie de Maurice Rollinat
Ajouté par Poetry Lover
Commentez! | Vote! | Copie!

Le Champ du diable
Le merle fuit, plein de paniques,
Les buissons recroquevillés :
Entendez-vous sous les noyers
Ces chuchotements ironiques ?
Quelles visions tyranniques !
J’en ai les yeux écarquillés.
— Le merle fuit, plein de paniques.
Les buissons recroquevillés.
Quant aux petits fumiers coniques,
Ils sont horriblement grillés.
S’ils allaient être éparpillés
Avec des fourches sataniques !
— Le merle fuit, plein de paniques.
poésie de Maurice Rollinat
Ajouté par Poetry Lover
Commentez! | Vote! | Copie!

Les Vierges
Le cœur des vierges de vingt ans
Est inquiet comme la feuille,
Et tout leur corps aspire et cueille
Les confidences du Printemps.
Le jour, aux parfums excitants
Du lilas et du chèvrefeuille,
Le cœur des vierges de vingt ans
Est inquiet comme la feuille.
Le soir, sur le bord des étangs,
Chacune rôde et se recueille,
Et leur secret que l'ombre accueille
Fait sourire ou pleurer longtemps
Le cœur des vierges de vingt ans.
poésie de Maurice Rollinat
Ajouté par Poetry Lover
Commentez! | Vote! | Copie!
