Le Sonneur
Cependant que la cloche éveille sa voix claire
A l’air pur et limpide et profond du matin
Et passe sur l’enfant qui jette pour lui plaire
Un angélus parmi la lavande et le thym,
Le sonneur effleuré par l’oiseau qu’il éclaire,
Chevauchant tristement en geignant du latin
Sur la pierre qui tend la corde séculaire,
N’entend descendre à lui qu’un tintement lointain.
Je suis cet homme. Hélas! de la nuit désireuse,
J’ai beau tirer le câble à sonner l’Idéal,
De froids péchés s’ébat un plumage féal,
Et la voix ne me vient que par bribes et creuse !
Mais, un jour, fatigué d’avoir en vain tiré,
O Satan, j’ôterai la pierre et me pendrai.
poésie de Stéphane Mallarmé (15 mars 1862)
Ajouté par anonyme
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