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Rodica Elena Lupu

Je vivrai

Je reprendrai tout à zéro,
Me disais-je. Tu le sais.
L'avenir... commence demain.
Je ferai du sport, je vivrai, j'aimerai. Vrai?
Maintenant, c'est juste une période de transition.
Tu sais. La répétition. Le prélude.
Cependant, certains meurent d'être trop frêles.
Pas nous!
La liberté suprême est pareille à une geôle,
Le passé, un miroir lequel nous tourne le dos,
Une locomotive.
Les gens courent pour tout reprendre à zéro.
Parfois, j'ai le vertige et un état de confusion,
De faiblesse.
Je ferai du sport,
Je serai fort.
Ces derniers jours, j'ai perdu une dent.
Je me sens vieux. Repoussant.
Une alvéole de vide
Des échos. Une licorne
L'ivoire de l'amour.
Certes, la chance de la médiocrité.
J'aimerai, je lirai, cela va sans dire.
Je serai cultivé et faible, accablé
Par les bubons de l'orphanité.
Mais que voulais-je vous dire? Ah oui!
Je vivrai... tout de même.

poésie de Rodica Elena Lupu de Autoportrait (2008), traduction par Constantin FrosinSignalez un problèmeDes citations similaires
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Sigmund Freud

Il serait certes très beau qu'il y eut un Dieu créateur du monde et une Providence pleine de bonté, un ordre moral de l'univers et une vie future, mais il est cependant très curieux que tout cela soit exactement ce que nous pourrions nous souhaiter à nous-mêmes.

Sigmund Freud dans L'avenir d'une illusionSignalez un problèmeDes citations similaires
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Il faut

Il faut survivre jusqu'à la menace
D'aneantir un jour, certain non ferier,
Porté, non plus s'est où... quel degueulasse?
Pourquoi, pourquoi on se ment, pour espèrer?

Il faut revivre tout ce qui s'est passé,
Pour te reprendre poussière perdue
Dans un vivant de faits, des jours cassés...
Pour en pouvoir tenir ta unique rue?

Il faut reprendre goùt de balader
Les lieux d'une fois, une fois, aux pieds tous nus,
Pouvoir ainsi du temps se l'exploser?!...
A quoi ça sert futur non prevenu?

Il faut quitter l'amour avant la fin,
Pour retenir suspense de son désastre?
Je ne sais pas; la vie est sans refrain
Pour le reprendre, un jour, après son astre?

Il faut qu'on sent ainsi tant de souffrance
Juste pour savoir qu'existe du bonneheur
Et qu'on apprend si peu de l'importance
Seulement après qu'on a vecu autant d'erreurs?

Il faut qu'on croit au faible mutilé,
Qui cherche a dire restant de son intègre,
Le regardant pour temps s'est vu passer,
D'un âme... qu'on garde caché, dans son tenebre!?

poésie de Daniel Aurelian Rădulescu (15 mai 2013)Signalez un problèmeDes citations similaires
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Alfred de Musset

A Madame G. (Rondeau)

Dans dix ans d'ici seulement,
Vous serez un peu moins cruelle.
C'est long, à parler franchement.
L'amour viendra probablement
Donner à l'horloge un coup d'aile.

Votre beauté nous ensorcelle,
Prenez-y garde cependant:
On apprend plus d'une nouvelle
En dix ans.

Quand ce temps viendra, d'un amant
Je serai le parfait modèle,
Trop bête pour être inconstant,
Et trop laid pour être infidèle.
Mais vous serez encor trop belle
Dans dix ans.

poésie de Alfred de MussetSignalez un problèmeDes citations similaires
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Je ne

J'ai déjà perdu mon adresse,
J'ai oublié celui d'avant.
Je n'en sais plus de carresse...
Je ne suis plus, ni mari, ni amant.

Je n'ai plus de sentiments;
Je les ai perdu dans l'armée.
Je n'ai plus aucun armement...
Je suis totalement desarmé.

Je suis vide de tout ce que j'aimais,
Je n'ai plus de présent, c'est foutu;
Je vis juste du vide, du jamais...
Je ne sais plus, je n'en sais plus.

Je me cherche jusqu'à la fin de la vue,
Je te cherche, te palper lettres en Braille.
Je t'attends, mon autrui, toi, ma brue...
Je suis nu de moi-même, je me caille!

poésie de Daniel Aurelian Rădulescu (11 novembre 2013)Signalez un problèmeDes citations similaires
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Iulia Hașdeu

Je n’ose

je veux te dire une chose
si tu pouvais m’ecouter!
tu m’ecoutes... mais je n’ose
non, je n’ose te parler.
je te sais bonne et tres douce:
mais je te crains malgre moi.
l’oiseau tremble dans la mousse
et je tremble devant toi.

j’ai bien des choses a dire
mais je ne peux pas, j’ai peur...
je te vois deja sourire
et ton sourire est moqueur.
ta bouche est comme une rose...
tu vas te railler de moi
je suis si gauche et je n’ose
lever les yeux devant toi!

ton port est un port de reine
ton regard est imposant
alors, tu comprends sans peine
pourquoi je t’admire tant
je te voudrais souveraine
et moi je serais ton roi
meme etant sur de ta haine
j’aimerais mourir pour toi

je suis bete, c’est possible
pourtant, je sais bien aimer
mon cœur n’est pas insensible
mais je ne puis m’exprimer
ah! si je savais te dire
l’amour que je sens pour toi
non, tu ne voudrais plus rire
et tu n’aimerais que moi.

poésie de Iulia HașdeuSignalez un problèmeDes citations similaires
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Déclaration

L'amour que je sens, l'amour qui me cuit,
Ce n'est pas l'amour chaste et platonique,
Sorbet à la neige avec un biscuit;
C'est l'amour de chair, c'est un plat tonique.

Ce n'est pas l'amour des blondins pâlots
Dont le rêve flotte au ciel des estampes.
C'est l'amour qui rit parmi des sanglots
Et frappe à coups drus l'enclume des tempes.

C'est l'amour brûlant comme un feu grégeois.
C'est l'amour féroce et l'amour solide.
Surtout ce n'est pas l'amour des bourgeois.
Amour de bourgeois, jardin d'invalide.

Ce n'est pas non plus l'amour de roman,
Faux, prétentieux, avec une glose
De si, de pourquoi, de mais, de comment.
C'est l'amour tout simple et pas autre chose.

C'est l'amour vivant. C'est l'amour humain.
Je serai sincère et tu seras folle,
Mon coeur sur ton coeur, ma main dans ta main.
Et cela vaut mieux que leur faribole!

C'est l'amour puissant. C'est l'amour vermeil.
Je serai le flot, tu seras la dune.
Tu seras la terre, et moi le soleil.
Et cela vaut mieux que leur clair de lune!

poésie de Jean RichepinSignalez un problèmeDes citations similaires
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William Shakespeare

Lysandre: Hélas! d’après tout ce que j’ai pu lire dans l’histoire — ou appris par ouï-dire, — l’amour vrai n’a jamais suivi un cours facile.

réplique de Le Songe d’une Nuit d’Été, scénario de William Shakespeare (1595), traduction par François-Victor HugoSignalez un problèmeDes citations similaires
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Les Deux Poitrinaires

La brise en soupirant caresse l’herbe haute.
Tous les deux, bouche ouverte, ils marchent côte à côte,
Dos voûté, cou fluet ;
Près d’une haie en fleurs où l'ébène des mûres
Luit dans le fouillis vert des mignonnes ramures,
Ils vont, couple muet.

Ils ont la face blanche et les pommettes rouges ;
Comme les débauchés qui vivent dans les bouges
On les voit chanceler.
Leur œil vaguement clair dans un cercle de bistre
A cette fixité nonchalante et sinistre
Qui vous fait reculer.

Ils ont une toux sèche, aiguë, intermittente.
Elle, après chaque accès, est toute palpitante,
Et lui, crache du sang !
Et l'on flaire la mort à ces poignants symptômes,
Et l’aspect douloureux de ces vivants fantômes
Opprime le passant.

Ils se serrent les mains dans une longue étreinte
Avec le tremblement de la pudeur contrainte
Se choquant au désir,
Et pour mieux savourer l’amour qui les enfièvre,
L’une à l’autre parfois se colle chaque lèvre,
Folles de se saisir.

Autour d’eux tout s’éveille et songe à se refaire.
Homme et bête à plein souffle aspirent l’atmosphère,
Rajeunis et contents.
Tout germe et refleurit ; eux, ils sont chlorotiques ;
Tout court ; et chaque pas de ces pauvres étiques
Les rend tout haletants.

Eux seuls font mal à voir, les amants poitrinaires
Avec leurs regards blancs comme des luminaires,
Et leur maigre longueur ;
Je ne sais quoi de froid, d’étrange et de torpide
Sort de ce couple errant, hagard, presque stupide
À force de langueur.

Et pourtant il leur faut l’amour et ses morsures !
Dépravés par un mal, aiguillon des luxures,
Ils avancent leur mort ;
Et le suprême élan de leur force brisée
S’acharne à prolonger dans leur chair épuisée
Le frisson qui les tord.

Se posséder ! Pour eux que la tristesse inonde,
C’est l’oubli des douleurs pendant une seconde,
C’est l’opium d’amour !
Ils se sentent mourir avec béatitude
Dans ce spasme sans nom dont ils ont l’habitude,
Jour et nuit, nuit et jour !

Ensemble ils ont passé par les phases funèbres
Où les nœuds acérés de leurs frêles vertèbres
Leur ont crevé la peau ;
Ensemble ils ont grincé de la même torture :
Donc, ils veulent payer ensemble à la nature
L’inévitable impôt.

Et le gazon muet, quoique plein d’ironies,
Va voir l’accouplement de ces deux agonies
Naître et se consommer ;
Et les profonds échos répéteront les râles
De ces deux moribonds dont les lèvres si pâles
Revivent pour aimer !

poésie de Maurice RollinatSignalez un problèmeDes citations similaires
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Cornelia Păun Heinzel

Le rythme de vie

Je marche dans le rythme entraînant de la musique,
Je vis dans le rythme vibrant de la ville,
Je me déplace dans le rythme mystérieux de la vie.
Mais ton rythme n’est pas le mien
Ni le sien ,
Bien que nous nous synchronisons parfois ...

Je respire dans le rythme passionnant de la danse,
Je pense dans le rythme alerte de son pas
Je regarde le rythme de la vie de ceux qui m’entourent
Différent du sien et du tien
Et cependant synchro avec le rythme sans interruption des jours
qui se succèdent l'un après d'autre.

Nous combattons dans le tourbillon impressionnant de la vie
Nous vibrons pour chaque seconde gagnée,
Nous courons après les mirages dans le désert ,
Que nous nous choisissons comme une réalité idéale
Mais ma fille Morgane n'est pas la même que la tienne,que la sienne
Et sûr que toujours touche l'une ou l'autre, mais jamais toutes...

poésie de Cornelia Păun Heinzel (29 mars 2014)Signalez un problèmeDes citations similaires
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Chamfort

En amour, tout est vrai, tout est faux ; et c’est la seule chose sur laquelle on ne puisse pas dire une absurdité.

citation de ChamfortSignalez un problèmeDes citations similaires
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Osho

L'ego veut toujours être le boss - quelque soit le coût, à tout prix. Vous perdez la belle opportunité de la vie juste pour satisfaire une ombre, une notion non substantielle - la notion de l'ego : "Je suis quelqu'un."Personne n'est quelqu'un. Nous sommes tous un; nous ne sommes pas séparés.

citation de OshoSignalez un problèmeDes citations similaires
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Flatter un créditeur, pour son terme allonger,

Flatter un créditeur, pour son terme allonger,
Courtiser un banquier, donner bonne espérance,
Ne suivre en son parler la liberté de France,
Et pour répondre un mot, un quart d'heure y songer :

Ne gâter sa santé par trop boire et manger,
Ne faire sans propos une folle dépense,
Ne dire à tous venants tout cela que l'on pense,
Et d'un maigre discours gouverner l'étranger :

Connaître les humeurs, connaître qui demande,
Et d'autant que l'on a la liberté plus grande,
D'autant plus se garder que l'on ne soit repris :

Vivre avecques chacun, de chacun faire compte :
Voilà, mon cher Morel (dont je rougis de honte),
Tout le bien qu'en trois ans à Rome j'ai appris.

poésie de Joachim du BellaySignalez un problèmeDes citations similaires
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Doulcin, quand quelquefois je vois ces pauvres filles

Doulcin, quand quelquefois je vois ces pauvres filles
Qui ont le diable au corps, ou le semblent avoir,
D'une horrible façon corps et tête mouvoir,
Et faire ce qu'on dit de ces vieilles Sibylles :

Quand je vois les plus forts se retrouver débiles,
Voulant forcer en vain leur forcené pouvoir :
Et quand même j'y vois perdre tout leur savoir
Ceux qui sont en votre art tenus des plus habiles :

Quand effroyablement écrier je les oy,
Et quand le blanc des yeux renverser je leur voy,
Tout le poil me hérisse, et ne sais plus que dire.

Mais quand je vois un moine avecques son latin
Leur tâter haut et bas le ventre et le tétin,
Cette frayeur se passe, et suis contraint de rire.

poésie de Joachim du BellaySignalez un problèmeDes citations similaires
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L'empathie, qui pour certains est un fardeau, ou même une marque de faiblesse, sait se différencier de la compassion qui n'est qu'éphémère. L'empathie se trouve en chacun de nous et fait de nous en partie ce que nous sommes car ses aspects, les bons comme les mauvais démontre notre force de vie. Reniez la, et vous plongerez dans l'indifférence collective. L'accepter c'est faire un pas vers l'acceptation de soit.

citation de Samuel HornbergSignalez un problèmeDes citations similaires
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Henry Miller

Etre soi-même, rien que soi-même, c'est inouï. Mais comment y arriver, comment y parvenir? Ah! c'est ça l'astuce, ça le plus difficile de tout. Le scabreux, c'est justement que cela ne demande pas d'effort. Le tout, c'est de ne pas vouloir être ceci ou cela, ni grand ni petit, ni habile ni maladroit...tu me suis? Tu agis selon ce qui se présente. Mais de bonne grâce, bien entendu. Parce qu'il n'y a pas une chose qui n'ait son importance. Pas une.

citation de Henry MillerSignalez un problèmeDes citations similaires
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Que ferai-je, Morel ? Dis-moi, si tu l'entends

Que ferai-je, Morel ? Dis-moi, si tu l'entends,
Ferai-je encore ici plus longue demeurance,
Ou si j'irai revoir les campagnes de France,
Quand les neiges fondront au soleil du printemps ?

Si je demeure ici, hélas, je perds mon temps
A me repaître en vain d'une longue espérance :
Et si je veux ailleurs fonder mon assurance,
Je fraude mon labeur du loyer que j'attends.

Mais faut-il vivre ainsi d'une espérance vaine ?
Mais faut-il perdre ainsi bien trois ans de ma peine ?
Je ne bougerai donc. Non, non, je m'en irai.

Je demourrai pourtant, si tu le me conseilles.
Hélas, mon cher Morel, dis-moi que je ferai,
Car je tiens, comme on dit, le loup par les oreilles.

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Charles Baudelaire

L'Ame du Vin

Un soir, l'âme du vin chantait dans les bouteilles:
"Homme, vers toi je pousse, ô cher déshérité,
Sous ma prison de verre et mes cires vermeilles,
Un chant plein de lumière et de fraternité!

Je sais combien il faut, sur la colline en flamme,
De peine, de sueur et de soleil cuisant
Pour engendrer ma vie et pour me donner l'âme;
Mais je ne serai point ingrat ni malfaisant,

Car j'éprouve une joie immense quand je tombe
Dans le gosier d'un homme usé par ses travaux,
Et sa chaude poitrine est une douce tombe
Où je me plais bien mieux que dans mes froids caveaux.

Entends-tu retentir les refrains des dimanches
Et l'espoir qui gazouille en mon sein palpitant?
Les coudes sur la table et retroussant tes manches,
Tu me glorifieras et tu seras content;

J'allumerai les yeux de ta femme ravie;
À ton fils je rendrai sa force et ses couleurs
Et serai pour ce frêle athlète de la vie
L'huile qui raffermit les muscles des lutteurs.

En toi je tomberai, végétale ambroisie,
Grain précieux jeté par l'éternel Semeur,
Pour que de notre amour naisse la poésie
Qui jaillira vers Dieu comme une rare fleur!"

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La Bière

Le menuisier entra, son mètre dans la main,
Et dit : « Bonjour ! Celui qu’on enterre demain,
Où donc est-il ? Voyons. Je viens prendre mesure !
Et comme il s’avançait au fond de la masure,
Il vit sur un grabat sinistre et dépouillé
Le mort couvert d’un drap ignoblement souillé.
Vaguement sous la toile on devinait des formes ;
Un bras sortait du linge, et des mouches énormes
Volaient avec fureur tout autour du chevet.
Sur une chaise usée un cierge s’achevait,
Sa lueur expirante éclairait le cadavre
Et laissait entrevoir cette scène qui navre :
Accroupie à l’écart, blême et nue à moitié,
Une femme pleurait en silence ; — Oh ! Pitié,
Pitié pour le chagrin de cette pauvre épouse !
Tandis que son enfant, implacable ventouse,
Mordillait son sein maigre et lui suçait le sang.
Ce petit corps chétif se tordait frémissant,
Les doigts crispés, l’œil blanc et la figure verte :
La puanteur soufflait comme une bouche ouverte,
Et l’âpre canicule en pleine irruption
Épaississait encor l’horrible infection.
L’ouvrier suffoqué recula vers la porte
Et dit : « C’est effrayant ! Que le diable m’emporte
« Si jamais j’ai senti pourriture à ce point !
« Quoi ? Vous gardez ce corps et vous n’étouffez point ?
« Sacrebleu ! Vous avez le cœur bon, citoyenne !
« Moi je fais tous les jours trois cercueils en moyenne :
« L’habit de bois et dont les boutons sont des vis,
« Je le mets à chacun, au père comme au fils,
« Aux riches comme aux gueux, aux filles comme aux vierge,
« Et j’aune mes longueurs à la lueur des cierges.
« Oui, puisque tout le monde a besoin de mon art,
« Je vais du presbytère au fond du lupanar ;
« Eh bien ! depuis vingt ans que je fais ma besogne,
« Je n’ai pas encor vu de pareille charogne !
« La fera qui voudra, sa bière, entendez-vous ! »
— Et, sans lever les yeux, la pauvresse à genoux,
Bleuâtre de fatigue et de douleur suprême,
Répondit simplement : « Je la ferai moi-même.

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Jacques Prevert

Cet amour

Cet amour
Si violent
Si fragile
Si tendre
Si désespéré
Cet amour
Beau comme le jour
Et mauvais comme le temps
Quand le temps est mauvais
Cet amour si vrai
Cet amour si beau
Si heureux
Si joyeux
Et si dérisoire
Tremblant de peur comme un enfant dans le noir
Et si sûr de lui
Comme un homme tranquille au millieu de la nuit
Cet amour qu faisait peur aux autres
Qui les faisait parler
Qui les faisait blêmir
Cet amour guetté
Parce que nous le guettions
Traqué blessé piétiné achevé nié oublié
Parce que nous l’avons traqué blessé piétiné achevé nié oublié
Cet amour tout entier
Si vivant encore
Et tout ensoleillé
C’est le tien
C’est le mien
Celui qui a été
Cette chose toujours nouvelle
Et qui n’a pas changé
Aussi vrai qu’une plante
Aussi tremblante qu’un oiseau
Aussi chaude aussi vivant que l’été
Nous pouvons tous les deux
Aller et revenir
Nous pouvons oublier
Et puis nous rendormir
Nous réveiller souffrir vieillir
Nous endormir encore
Rêver à la mort,
Nous éveiller sourire et rire
Et rajeunir
Notre amour reste là
Têtu comme une bourrique
Vivant comme le désir
Cruel comme la mémoire
Bête comme les regrets
Tendre comme le souvenir
Froid comme le marble
Beau comme le jour
Fragile comme un enfant
Il nous regarde en souriant
Et il nous parle sans rien dire
Et moi je l’écoute en tremblant
Et je crie
Je crie pour toi
Je crie pour moi
Je te supplie
Pour toi pour moi et pour tous ceux qui s’aiment
Et qui se sont aimés
Oui je lui crie
Pour toi pour moi et pour tous les autres
Que je ne connais pas
Reste là
Lá où tu es
Lá où tu étais autrefois
Reste là
Ne bouge pas
Ne t’en va pas
Nous qui sommes aimés
Nous t’avons oublié
Toi ne nous oublie pas
Nous n’avions que toi sur la terre
Ne nous laisse pas devenir froids
Beaucoup plus loin toujours
Et n’importe où
Donne-nous signe de vie
Beaucoup plus tard au coin d’un bois
Dans la forêt de la mémoire
Surgis soudain
Tends-nous la main
Et sauve-nous.

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La Mauvaise Rencontre

Il fait un de ces temps où la sueur vous trempe,
Où l’on est de plomb pour marcher,
Gorge sèche et feu dans les tempes.
Sur le haut d’un petit rocher
Un grand chat noir se tient juché,
Tandis que juste au bas une vipère rampe.

D’où vient ce chat lisse et narquois
Qui n’a pas du tout l’air de vivre dans les bois ?
Pourquoi, si tard, cette vipère
N’est-elle pas dans son repaire ?

L’une, par sa langue fourchue,
L’autre, par le vert de ses yeux,
Illuminent, mystérieux,
Leur coin de lumière déchue.

Le silence plein de féerie
Parfois est coupé seulement
D’un sarcastique sifflement,
D’une amère miaulerie.

Et, par ce soleil au déclin,
Le reptile et le beau félin
Sont d’une horreur inoubliable.
Il semble qu’en ce lieu discret
Sous deux formes vous apparaît
La personne même du diable !

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