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Les Chauves-souris

Mais pourquoi voler avec tant de mystère
« Et si longuement dans ces grands corridors ?
« Vous seriez si bien à votre aise dehors,
« Dans le brouillard frais qui tombe sur la terre.

« Vous avez sans doute un vol involontaire,
« O chauves-souris noires comme un remords !
« Mais pourquoi voler avec tant de mystère
« Et si longuement dans ces grands corridors ?

« Pour ainsi hanter ce château solitaire,
« Vous n’êtes pas des âmes de mauvais morts ?
« Enfin, pour ce soir, vivent les esprits forts !
« Je reste là, sans que la frayeur m’attère.
« Mais pourquoi voler avec tant de mystère ?

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Iulia Hașdeu

À quoi bon?

Madame, je pourrais vous dâre
Que vos beaux yeux
Que chacun avec crainte admire
Şont plus azurés que les cieux
Mais à quoi bon? Vous ne feriez qu’en rire.

Je pourrais vous dâre bien bas
Que tous vos charmes
Que tous vos merveilleux appas
Ont souvent fait couler des larmes;
Mais à quoi bon? Vous ne le croiriez pas.

Enfin, avec un trouble extrême
Avec ardeur
Je vous dirais que je vous aime
Que vous avez blessé mon cœur
Mais à quoi bon? Vous le savez vous même.

poésie de Iulia HașdeuSignalez un problèmeDes citations similaires
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Les Arbres

Arbres, grands végétaux, martyrs des saisons fauves.
Sombres lyres des vents, ces noirs musiciens,
Que vous soyez feuillus ou que vous soyez chauves,
Le poète vous aime et vos spleens sont les siens.

Quand le regard du peintre a soif de pittoresque.
C’est à vous qu’il s’abreuve avec avidité,
Car vous êtes l’immense et formidable fresque
Dont la terre sans fin pare sa nudité.

De vous un magnétisme étrange se dégage.
Plein de poésie âpre et d’amères saveurs ;
Et quand vous bruissez, vous êtes le langage
Que la nature ébauche avec les grands rêveurs.

Quand l’éclair et la foule enflent rafale et grêle,
Les forêts sont des mers dont chaque arbre est un flot.
Et tous, le chêne énorme et le coudrier grêle,
Dans l’opaque fouillis poussent un long sanglot.

Alors, vous qui parfois, muets comme des marbres,
Vous endormez, pareils à des cœurs sans remords,
Vous tordez vos grands bras, vous hurlez, pauvres arbres,
Sous l’horrible galop des éléments sans mors.

L’été, plein de langueurs, l’oiseau clôt ses paupières
Et dort paisiblement sur vos mouvants hamacs,
Vous êtes les écrans des herbes et des pierres
Et vous mêlez votre ombre à la fraîcheur des lacs.

Et quand la canicule, aux vivants si funeste,
Pompe les étangs bruns, miroirs des joncs fluets,
Dans l’atmosphère lourde où fermente la peste,
Vous immobilisez vos branchages muets.

Votre mélancolie, à la fin de l’automne,
Est pénétrante, alors que sans fleurs et sans nids,
Sous un ciel nébuleux où d’heure en heure il tonne,
Vous semblez écrasés par vos rameaux jaunis.

Les seules nuits de mai, sous les rayons stellaires,
Aux parfums dont la terre emplit ses encensoirs,
Vous oubliez parfois vos douleurs séculaires
Dans un sommeil bercé par le zéphyr des soirs.

Une brume odorante autour de vous circule
Quand l’aube a dissipé la nocturne stupeur,
Et, quand vous devenez plus grands au crépuscule,
Le poète frémit comme s’il avait peur.

Sachant qu’un drame étrange est joué sous vos dômes,
Par les bêtes le jour, par les spectres la nuit,
Pour voir rôder les loups et glisser les fantômes,
Vos invisibles yeux s’ouvrent au moindre bruit.

Et le soleil vous mord, l’aquilon vous cravache,
L’hiver vous coud tout vifs dans un froid linceul blanc,
Et vous souffrez toujours jusqu’à ce que la hache
Taillade votre chair et vous tranche en sifflant.

Partout où vous vivez, chênes, peupliers, ormes,
Dans les cités, aux champs, et sur les rocs déserts,
Je fraternise avec les tristesses énormes
Que vos sombres rameaux épandent par les airs.

poésie de Maurice RollinatSignalez un problèmeDes citations similaires
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Ballade du châtaignier rond

Le râle de genêts croassait dans les prés
Comme un peigne qu’on racle au milieu du mystère ;
Le soir décolorait les arbres effarés,
Et lentement la Lune, au ras du ciel austère,
Se recourbait en arc ainsi qu’un cimeterre.
C’est alors que, tout seul dans la vallée, au bruit
Du crapaud des étangs qui flûtait son ennui,
Par les taillis scabreux, les labours et le chaume,
Je m’en allais parfois rêver jusqu’à minuit
Sous le châtaignier rond dressé comme un fantôme.

Aux bêlements lointains des moutons égarés,
Plus fatidiquement qu’un glas de monastère,
Le chat-huant mêlait ses sanglots acérés,
Si tristes, qu’un frisson de peur involontaire
Vous prend, lorsqu’un mauvais écho les réitère.
C’était l’heure des loups que le sorcier conduit ;
De la voix qui vous hèle, et du pas qui vous suit ;
Le grillon n’avait plus qu’un murmure d’atome ;
Et la mousse enchâssait le petit ver qui luit
Sous le châtaignier rond dressé comme un fantôme.

Le court vacillement des farfadets soufrés
Annonçant des esprits qui revenaient sur terre,
Dansait au bout des joncs des chemins engouffrés ;
Puis, à la longue, tout finissait par se taire,
Et le silence entrait dans la nuit solitaire.
Et j’oubliais la tombe où la Mort nous réduit
En cendres ! J’oubliais le monde qui me nuit ;
Le sommeil des buissons me charriait son baume,
Et je m’évaporais avec le vent qui fuit
Sous le châtaignier rond dressé comme un fantôme.

poésie de Maurice RollinatSignalez un problèmeDes citations similaires
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Ce n'est pas sans propos qu'en vous le ciel a mis

Ce n'est pas sans propos qu'en vous le ciel a mis
Tant de beautés d'esprit et de beautés de face,
Tant de royal honneur et de royale grâce,
Et que plus que cela vous est encor promis.

Ce n'est pas sans propos que les destins amis,
Pour rabaisser l'orgueil de l'espagnole audace,
Soit par droit d'alliance ou soit par droit de race,
Vous ont par leurs arrêts trois grands peuples soumis.

Ils veulent que par vous la France et l'Angleterre
Changent en longue paix l'héréditaire guerre
Qui a de père en fils si longuement duré :

Ils veulent que par vous la belle vierge Astrée
En ce siècle de fer refasse encore entrée,
Et qu'on revoie encor le beau siècle doré.

poésie de Joachim du BellaySignalez un problèmeDes citations similaires
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Les Yeux morts

De ses grands yeux chastes et fous
Il ne reste pas un vestige :
Ces yeux qui donnaient le vertige
Sont allés où nous irons tous.

En vain, ils étaient frais et doux
Comme deux bluets sur leur tige ;
De ses grands yeux chastes et fous
Il ne reste pas un vestige.

Quelquefois, par les minuits roux
Pleins de mystère et de prestige,
La morte autour de moi voltige,
Mais je ne vois plus que les trous
De ses grands yeux chastes et fous !

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La Putréfaction

Au fond de cette fosse moite
D’un perpétuel suintement,
Que se passe-t-il dans la boîte,
Six mois après l’enterrement ?

Verrait-on encor ses dentelles ?
L’œil a-t-il déserté son creux ?
Les chairs mortes ressemblent-elles
À de grands ulcères chancreux ?

La hanche est-elle violâtre
Avec des fleurs de vert-de-gris,
Couleurs que la Mort idolâtre,
Quand elle peint ses corps pourris ?

Pendant qu’un pied se décompose,
L’autre sèche-t-il, blanc, hideux,
Ou l’horrible métamorphose
S’opère-t-elle pour les deux ?

Le sapin servant d’ossuaire
Se moisit-il sous les gazons ?
Le cadavre dans son suaire
A-t-il enfin tous ses poisons ?

Sous le drap que mangent et rouillent
L'humidité froide et le pus,
Les innombrables vers qui grouillent
Sont-ils affamés ou repus ?

Que devient donc tout ce qui tombe
Dans le gouffre ouvert nuit et jour ?
— Ainsi, j’interrogeais la tombe
D’une fille morte d’amour.

Et la tombe que les sceptiques
Rayent toujours de l’avenir,
Me jeta ces mots dramatiques
Qui vivront dans mon souvenir :

« Les seins mignons dont tu raffoles,
« Questionneur inquiétant,
« Et les belles lèvres si folles,
« Les lèvres qui baisèrent tant,

« Toutes ces fleurs roses et blanches
« Sont les premières à pourrir
« Dans la prison des quatre planches,
« Que nulle main ne peut ouvrir.

« Mais, quant à l’âme, revit-elle ?
« Avec son calme ou ses remords,
« Faut-il crier qu’elle est mortelle
« Ou qu’elle plane sur les morts ?

« Je ne sais ! Mais apprends que l’ombre
« Que l’homme souffre en pourrissant :
« Le cadavre est un muet sombre,
« Qui ne dit pas ce qu’il ressent !

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Les Yeux

Partout je les évoque et partout je les vois,
Ces yeux ensorceleurs si mortellement tristes.
Oh ! comme ils défiaient tout l’art des coloristes,
Eux qui mimaient sans geste et qui parlaient sans voix !

Yeux lascifs, et pourtant si noyés dans l’extase,
Si friands de lointain, si fous d’obscurité !
Ils s’ouvraient lentement, et, pleins d’étrangeté,
Brillaient comme à travers une invisible gaze.

Confident familier de leurs moindres regards,
J’y lisais des refus, des vœux et des demandes ;
Bleus comme des saphirs, longs comme des amandes,
Ils devenaient parfois horriblement hagards.

Tantôt se reculant d’un million de lieues,
Tantôt se rapprochant jusqu’à rôder sur vous,
Ils étaient tour à tour inquiétants et doux :
Et moi, je suis hanté par ces prunelles bleues !

Quels vers de troubadours, quels chants de ménestrels,
Quels pages chuchoteurs d’exquises babioles,
Quels doigts pinceurs de luths ou gratteurs de violes
Ont célébré des yeux aussi surnaturels !

Ils savouraient la nuit, et vers la voûte brune
Ils se levaient avec de tels élancements,
Que l’on aurait pu croire, à de certains moments,
Qu’ils avaient un amour effréné pour la lune.

Mais ils considéraient ce monde avec stupeur :
Sur nos contorsions, nos colères, nos rixes,
Le spleen en découlait dans de longs regards fixes
Où la compassion se mêlait à la peur.

Messaline, Sapho, Cléopâtre, Antiope
Avaient fondu leurs yeux dans ces grands yeux plaintifs.
Oh ! comme j’épiais les clignements furtifs
Qui leur donnaient soudain un petit air myope.

Aux champs, l’été, dans nos volontaires exils,
Près d’un site charmeur où le regard s’attache,
Ô parcelles d’azur, ô prunelles sans tache,
Vous humiez le soleil que tamisaient vos cils !

Vous aimiez les frissons de l’herbe où l’on se vautre ;
Et parfois au-dessus d’un limpide abreuvoir
Longtemps vous vous baissiez, naïves, pour vous voir
Dans le cristal de l’eau moins profond que le vôtre.

Deux bluets par la brume entrevus dans un pré
Me rappellent ces yeux brillant sous la voilette,
Ces yeux de courtisane admirant sa toilette
Avec je ne sais quoi d’infiniment navré.

Ma passion jalouse y buvait sans alarmes,
Mon âme longuement s’y venait regarder,
Car ces magiques yeux avaient pour se farder
Le bistre du plaisir et la pâleur des larmes !…

poésie de Maurice RollinatSignalez un problèmeDes citations similaires
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Vous trouverez votre force en vous-même, dans les profondeurs de votre être que vous n'avez encore jamais osé regarder. Sachez que vous possédez tout ce dont vous avez besoin pour accomplir aujourd'hui tout ce qu'il y a de bon et de bien dans votre vie.

citation de Ruth FishelSignalez un problèmeDes citations similaires
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Marches funèbres

Toi, dont les longs doigts blancs de statue amoureuse,
Agiles sous le poids des somptueux anneaux,
Tirent la voix qui berce et le sanglot qui creuse
Des entrailles d’acier de tes grands pianos,

Toi, le cœur inspiré qui veut que l’Harmonie
Soit une mer où vogue un chant mélodieux,
Toi qui, dans la musique, à force de génie,
Fais chanter les retours et gémir les adieux,

Joue encore une fois ces deux marches funèbres
Que laissent Beethoven et Chopin, ces grands morts,
Pour les agonisants, pèlerins des ténèbres,
Qui s’en vont au cercueil, graves et sans remords.

Plaque nerveusement sur les touches d’ivoire
Ces effrayants accords, glas de l’humanité,
Où la vie en mourant exhale un chant de gloire
Vers l’azur idéal de l’immortalité.

Et tu seras bénie, et ce soir dans ta chambre
Où tant de frais parfums vocalisent en chœur,
Poète agenouillé sous tes prunelles d’ambre,
Je baiserai tes doigts qui font pleurer mon cœur !

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Non pour ce qu'un grand roi ait été votre père,

Non pour ce qu'un grand roi ait été votre père,
Non pour votre degré et royale hauteur,
Chacun de votre nom veut être le chanteur,
Ni pour ce qu'un grand roi soit ores votre frère.

La nature, qui est de tous commune mère,
Vous fit naître, Madame, avecques ce grand heur,
Et ce qui accompagne une telle grandeur,
Ce sont souvent des dons de fortune prospère.

Ce qui vous fait ainsi admirer d'un chacun,
C'est ce qui est tout vôtre, et qu'avec vous commun
N'ont tous ceux-là qui ont couronnes sur leurs têtes :

Cette grâce et douceur, et ce je ne sais quoi,
Que quand vous ne seriez fille ni soeur de roi,
Si vous jugerait-on être ce que vous êtes.

poésie de Joachim du BellaySignalez un problèmeDes citations similaires
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Le Petit Fantôme

J’habite l’Océan,
Les joncs des marécages,
Les étranges pacages
Et le gouffre béant.

Je plonge sous les flots,
Je danse sur la vague,
Et ma voix est si vague
Qu’elle échappe aux échos.

Je sonde les remous
Et, sur le bord des mares,
Je fais des tintamarres
Avec les crapauds mous.

Je suis dans les gazons
Les énormes vipères,
Et dans leurs chauds repaires
J’apporte des poisons.

Je sème dans les bois
Les champignons perfides ;
Quand je vois des sylphides,
Je les mets aux abois.

J’attire le corbeau
Vers l’infecte charogne,
J’aime que son bec rogne
Ce putride lambeau.

Je ris quand le follet
Séduit avec son leurre
L’enfant perdu qui pleure
De se voir si seulet.

Je vais dans les manoirs
Où le hibou m’accueille ;
J’erre de feuille en feuille
Au fond des halliers noirs.

Mais, malgré mon humour
Satanique et morose,
Je vais baiser la rose
Tout palpitant d’amour.

Les nocturnes parfums
Me jettent leurs bouffées ;
Je hais les vieilles fées
Et les mauvais défunts.

La forêt me chérit,
Je jase avec la lune ;
Je folâtre dans l’une
Et l’autre me sourit.

La rosée est mon vin.
Avec les violettes
Je bois ses gouttelettes
Dans le fond du ravin.

Quelquefois j’ose aller
Au fond des grottes sourdes ;
Et sur les brumes lourdes
Je flotte sans voler.

A moi le loup rôdant
Et les muets cloportes !
Les choses qu’on dit mortes
M’ont pris pour confident.

Quand les spectres blafards
Rasent les étangs mornes,
J’écoute les viornes
Parler aux nénuphars.

Invisible aux humains,
Je suis les penseurs chauves
Et les poètes fauves
Vaguant par les chemins.

Quand arrive minuit,
Je dévore l’espace,
Dans l’endroit où je passe
On n’entend pas de bruit.

Mais lorsque le soleil
Vient éclairer la terre,
Dans les bras du mystère
Je retourne au sommeil.

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Nichita Stănescu

Mon âme, Psyché

Un ange est venu et m’a dit:
- T’es un porc de chien,
vermine et groin.
L’herbe pue sous ton ombre
qui lui pèse.
Et ton haleine sent la boue!
- Mais pourquoi, lui criais-je, pourquoi?
- Sans raison!
Un ange est venu et m’a dit:
- Le verre est plus transparent
que la plus limpide de tes pensées!
Après ta mort, les vers
grouilleront dans tes narines, dans ta gueule,
dans ton groin, dans ta trompe!
- Pourquoi, lui criais-je, pourquoi?
- Sans raison, m’a-t-il répondu...
Puis l’ange, ah, l’ange, ah, l’ange, ah, l’ange,
s’envola, ses ailes d’or flottant
dans l’air d’or.
Des papillons d’or
voltigeaient dans l’aura de l’ange d’or.
Il volait ahuri,
tout en or,
s’éloignant aux lointains mordorés
où sombrait un soleil baigné d’or.
- Pourquoi t’éloignes-tu de moi,
lui criais-je, pourquoi me quittes-tu, pourquoi?
- Sans raison, m’a-t-il répondu. Sans raison...

poésie de Nichita Stănescu de Dans le doux style classique (1970), traduction par Lucia SotirovaSignalez un problèmeDes citations similaires
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Fin d'hiver

Par ce temps si bénin, après tant de froidure,
Dans les grands terrains gris, sur les coteaux chenus,
On a l'impression parmi ces arbres nus
D'un très beau jour d'été sans fleurs et sans verdure.

Les pieds ne glissent plus sur la terre moins dure
Où les feux du soleil, presque tous revenus,
Allument cailloux, rocs, sable et gazons menus.
Dans l'atmosphère souffle un vent tiède qui dure.

Et çà et là - près d'un marais,
D'un taillis, d'un pacage, auprès
D'un ruisseau bordé de vieux aunes,

Le printemps s'annonce à vos yeux
Avec le vol silencieux
De beaux petits papillons jaunes.

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Le Veuf

C’que c’est ! j’ me s’rais pas cru r’mariable...
Et v’là que j’ trouve un aut’ parti !
D’avec moi l’ diable était parti :
Faut que j’ me r’mette avec le Diable !

Content d’êt’ plus qu’un, je me r’double.
J’étais dans la paix, je m’ retrouble.
D’humeur et d’ facons lib’ comm’ l’air,
V’là que je m’ reboucl’ dans les fers !

Vous en comprenez ben l’ pourquoi.
J’ suis en chair et non pas en bois.
Ceux f’mell’ qui m’échauff’ tant la bile
J’ rest’ pas un jour sans y penser ;
Et dir’ ! si j’ pouvais m’en passer,
Que j’ s’rais mon seul maîtr’, si tranquille !

Enfin, faut espérer q’ la nouvell’ que j’ vas prendre,
Dans sa natur’ de femme agit et pens’ comm’ moi.
C’qui prouv’rait qu’en amour si j’ suis pas d’ ceux plus froids,
Ell’, non plus, tout à fait, ell’ gèl’ pas à pierr’ fendre.

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La Femme stérile

Ses jupons troussés court comme sa devantière,
Sous ses gros bas bleus bien tirés
Laissant voir ses mollets cambrés
À mi-chemin des jarretières,
S’en vient près du vieux cantonnier
La femme rousse du meunier :
Cheveux frisés sur des yeux mièvres,
Blanche de peau, rouge de lèvres,
Le corsage si bien rempli
Qu’il bombe aux deux endroits, sans pli,
Cotillon clair moulant énormes
Le callipyge de ses formes.
Voilà ce qu’elle dit alors au père Pierre
En train de casser de la pierre :

« Voyez ! si l’on n’a pas d’malheur,
Et si n’faut pas que l’diab’ s’en mêle !
J’suis pourtant un’ solid’ femelle,
En plein’ force et dans tout’ sa fleur,


Eh ben ! yaura six ans à Pâques
Que j’somm’ mariés, et q’tels qu’avant,
Nous pouvons pas avoir d’enfant !
Ça s’ra pour c’te fois, disait Jacques,

Mais toujou sans p’tit le temps passa…
Et qu’on en voudrait tant un ! Dame !
C’est pas d’not’ faut’ ! l’homme et la femme
On fait ben tout c’qui faut pour ça.

J’ai fait dir’ des mess’ de pèl’rins,
Brûler des cierg’ aux saints, aux saintes,
Dans des églis’ en souterrains,
Mais ouah ! j’suis pas d’venue enceinte.

Les prièr’ ? les r’mèd’ de tout’ sorte ?
Méd’cins ? Curés ? n’m’ont servi d’rin.
J’suis tell’ comme un mauvais terrain
Qu’on ens’menc’ ben sans qu’i’ rapporte.

Et vrai ! C’est pourtant pas qu’on triche !
Mais, des fois, vous q’êt’s’ un ancien.
Si vous connaissiez un moyen ?
Faut me l’donner ! mon pèr’ Pierriche.

Alors, le vieux lâchant sa masse,
À genoux sur son tas, voûté,
Lui répond avec la grimace
Du satyre qu’il est resté,

La couvant de son Å“il vert brun
Qui lèche, tâte, enlace, vrille :
« Sais-tu c’que t’as à fair’, ma fille ?
Eh ben ! faut aller à l’emprunt.

Et la meunière aux yeux follets,
Qui sait ce que parler veut dire,
S’écrie en éclatant de rire :
« Vous seriez l’prêteur, si j’voulais.

Hein ? fiez-vous donc à c’bon apôtre !
Mais j’veux pas d’vous, vieux scélérat !
Et lui : « T’as ma r’cett’ qui pourra
P’t’êt’ ben t’servir avec un autre.

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Mariana Alcoforado

Néanmoins, j'ai assez éprouvé que vous n'êtes guère capable d'un grand entêtement, et que vous pourrez bien m'oublier sans aucun secours, et sans y être contraint par une nouvelle Passion. Peut-être, voudrais-je que vous eussiez quelque prétexte raisonnable? Il est vrai que je serais plus malheureuse, mais vous ne seriez pas si coupable.

Mariana Alcoforado dans Lettres Portugaises (1669), traduction par Gabriel-Joseph de GuilleraguesSignalez un problèmeDes citations similaires
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Les glissoires

Il fait un froid noir et tout gèle :
Abreuvoir, écluse et ruisseau.
Tous les puits, à l'endroit du seau,
Ont de la glace à leur margelle.

C'est pourquoi, vite, après la classe,
Les enfants viennent, à grands cris,
Glisser sur l'étang si bien pris
Qu'ils ne craignent pas que ça casse.

En tas, casquettes sans visière,
Bérets bâillants, chapeaux tortus,
Ils arrivent, les reins battus
Par leur petite carnassière.

Et, de-ci, de-là, tout heureuse,
Chaque troupe se met au jeu,
Sillonnant à la queue leu leu
La belle surface vitreuse.

Légères, folles, bien ingambes,
Elles ont indéfiniment
Le caprice du mouvement
Ces fragiles petites jambes !

Rapidement, mainte glissoire
Qu'en choeur tant de mutins sabots
Polissent comme des rabots
Est nivelée et presque noire.

On les voit gris et bleus les mioches
Qui, d'un trait, au bas des airs blancs,
Passent, les bras tendus, ballants,
Croisés - ou les mains dans les poches.

Et, plus d'un faisant la mimique
D'accomplir un besoin pressant
Reste accroupi, tout en glissant,
Avec un naturel comique.

Quelques très petiots se hasardent,
Mais, tombés trop fort, ayant peur,
Immobiles, pleins de stupeur,
Se tiennent au bord et regardent ;

Ils sont charmants, piteux et drôles,
Ces pauvres mignons étonnés,
Grelottants, la roupie au nez,
Le cou rentré dans les épaules !

Les autres, au long des saulaies,
Filent toujours avec entrain :
Tels, devant les vitres d'un train
Courent les arbres et les haies.

Sur le bruit des voix qui remplissent
Les échos de leurs appels fous
Tranche le vacarme des clous
Mordant, raclant, autant qu'ils glissent.

De loin, vous entendez, il semble,
Tant c'est ronfleur, dur et perçant,
Plus de cent meules repassant
Qui grinceraient toutes ensemble.

- Autour, des plaines dépouillées
Montrant leurs vieux herbages gris ;
Des arbres nus, d'autres maigris :
Tête ronde et feuilles rouillées.

Mais, vifs et gais comme la flamme,
Ces garçonnets au teint vermeil
Mettent là verdure et soleil :
Tout le printemps qu'ils ont dans l'âme.

Au coeur du paysage triste,
Entre ces lointains malheureux,
Sous ce ciel de métal, - par eux
La vie un instant resubsiste.

Ils sont le bonheur d'aventure,
L'éclat de rire triomphant
Qui passe comme un coup de vent
En cette mort de la nature !

Mais il se fait tard, le jour baisse.
Les glisseurs vont, moins résolus,
Et, bientôt, on ne les voit plus
Qu'à travers une brume épaisse.

Rien qu'un dernier monôme roide
De petits fantômes en noir !
Tous à la file ! - et puis, bonsoir !
Ils se sauvent dans l'ombre froide.

Et, la nuit, aux torpeurs funèbres,
Donne un mystère inquiétant
Au face à face de l'étang
Avec la lune ou les ténèbres.

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Les Glissoires

Il fait un froid noir et tout gèle :
Abreuvoir, écluse et ruisseau.
Tous les puits, à l’endroit du seau,
Ont de la glace à leur margelle.

C’est pourquoi, vite, après la classe,
Les enfants viennent, à grands cris,
Glisser sur l’étang si bien pris
Qu’ils ne craignent pas que ça casse.

En tas, casquettes sans visière,
Bérets bâillants, chapeaux tortus,
Ils arrivent, les reins battus
Par leur petite carnassière.

Et, de-ci, de-là, tout heureuse,
Chaque troupe se met au jeu,
Sillonnant à la queue leu leu
La belle surface vitreuse.

Légères, folles, bien ingambes,
Elles ont indéfiniment
Le caprice du mouvement
Ces fragiles petites jambes !

Rapidement, mainte glissoire
Qu’en chœur tant de mutins sabots
Polissent comme des rabots
Est nivelée et presque noire.

On les voit gris et bleus les mioches
Qui, d’un trait, au bas des airs blancs,
Passent, les bras tendus, ballants,
Croisés — ou les mains dans les poches.

Et, plus d’un faisant la mimique
D’accomplir un besoin pressant
Reste accroupi, tout en glissant,
Avec un naturel comique.

Quelques très petiots se hasardent,
Mais, tombés trop fort, ayant peur,
Immobiles, pleins de stupeur,
Se tiennent au bord et regardent ;

Ils sont charmants, piteux et drôles,
Ces pauvres mignons étonnés,
Grelottants, la roupie au nez,
Le cou rentré dans les épaules !

Les autres, au long des saulaies,
Filent toujours avec entrain :
Tels, devant les vitres d’un train
Courent les arbres et les haies.

Sur le bruit des voix qui remplissent
Les échos de leurs appels fous
Tranche le vacarme des clous
Mordant, raclant, autant qu’ils glissent.

De loin, vous entendez, il semble,
Tant c’est ronfleur, dur et perçant,
Plus de cent meules repassant
Qui grinceraient toutes ensemble.

— Autour, des plaines dépouillées
Montrant leurs vieux herbages gris ;
Des arbres nus, d’autres maigris :
Tête ronde et feuilles rouillées.

Mais, vifs et gais comme la flamme,
Ces garçonnets au teint vermeil
Mettent là verdure et soleil :
Tout le printemps qu’ils ont dans l’âme.

Au cœur du paysage triste,
Entre ces lointains malheureux,
Sous ce ciel de métal, — par eux
La vie un instant resubsiste.

Ils sont le bonheur d’aventure,
L’éclat de rire triomphant
Qui passe comme un coup de vent
En cette mort de la nature !

Mais il se fait tard, le jour baisse.
Les glisseurs vont, moins résolus,
Et, bientôt, on ne les voit plus
Qu’à travers une brume épaisse.

Rien qu’un dernier monôme roide
De petits fantômes en noir !
Tous à la file ! — et puis, bonsoir !
Ils se sauvent dans l’ombre froide.

Et, la nuit, aux torpeurs funèbres,
Donne un mystère inquiétant
Au face à face de l’étang
Avec la lune ou les ténèbres.

poésie de Maurice RollinatSignalez un problèmeDes citations similaires
Ajouté par Poetry Lover
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Paul Verlaine

Il pleure dans mon cœur

Il pleut doucement sur la ville (Arthur Rimbaud)

Il pleure dans mon cœur
Comme il pleut sur la ville;
Quelle est cette langueur
Qui pénètre mon cœur?

Ô bruit doux de la pluie
Par terre et sur les toits!
Pour un cœur qui s'ennuie,
Ô le chant de la pluie!

Il pleure sans raison
Dans ce cœur qui s'écœure.
Quoi! Nulle trahison?...
Ce deuil est sans raison.

C'est bien la pire peine
De ne savoir pourquoi
Sans amour et sans haine
Mon cœur a tant de peine!

poésie de Paul VerlaineSignalez un problèmeDes citations similaires
Ajouté par anonyme
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Ce à quoi vous pensez maintenant façonnera votre vie future. Vous créez votre vie avec vos pensées. Vous créez sans arrêt parce que vous pensez sans arrêt. Ce à quoi vous pensez le plus ou ce sur quoi vous vous concentrez le plus, est ce qui se manifestera dans votre vie.

citation de Rhonda ByrneSignalez un problèmeDes citations similaires
Ajouté par Micheleflowerbomb
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