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Que n'ai-je encor la harpe thracienne

Que n'ai-je encor la harpe thracienne,
Pour réveiller de l'enfer paresseux
Ces vieux Césars, et les ombres de ceux
Qui ont bâti cette ville ancienne ?

Ou que je n'ai celle amphionienne,
Pour animer d'un accord plus heureux
De ces vieux murs les ossements pierreux,
Et restaurer la gloire ausonienne ?

Pussé-je au moins d'un pinceau plus agile
Sur le patron de quelque grand Virgile
De ces palais les portraits façonner :

J'entreprendrais, vu l'ardeur qui m'allume,
De rebâtir au compas de la plume
Ce que les mains ne peuvent maçonner.

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Ces grands monceaux pierreux, ces vieux murs que tu vois

Ces grands monceaux pierreux, ces vieux murs que tu vois
Furent premièrement le clos d'un lieu champêtre :
Et ces braves palais, dont le temps s'est fait maître,
Cassines de pasteurs ont été quelquefois.

Lors prirent les bergers les ornements des rois,
Et le dur laboureur de fer arma sa dextre :
Puis l'annuel pouvoir le plus grand se vit être,
Et fut encor plus grand le pouvoir de six mois :

Qui, fait perpétuel, crut en telle puissance,
Que l'aigle impérial de lui prit sa naissance :
Mais le Ciel, s'opposant à tel accroissement,

Mit ce pouvoir ès mains du successeur de Pierre,
Qui sous nom de pasteur, fatal à cette terre,
Montre que tout retourne à son commencement.

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Toi qui de Rome émerveillé contemples

Toi qui de Rome émerveillé contemples
L'antique orgueil, qui menaçait les cieux,
Ces vieux palais, ces monts audacieux,
Ces murs, ces arcs, ces thermes et ces temples,

Juge, en voyant ces ruines si amples,
Ce qu'a rongé le temps injurieux,
Puisqu'aux ouvriers les plus industrieux
Ces vieux fragments encor servent d'exemples.

Regarde après, comme de jour en jour
Rome, fouillant son antique séjour,
Se rebâtit de tant d'oeuvres divines :

Tu jugeras que le démon romain
S'efforce encor d'une fatale main
Ressusciter ces poudreuses ruines.

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Les Antiquités de Rome

Nouveau venu, qui cherches Rome en Rome
Et rien de Rome en Rome n’aperçois,
Ces vieux palais, ces vieux arcs que tu vois
Et ces vieux murs, c’est ce que Rome on nomme.

Vois quel orgueil, quelle ruine et comme
Celle qui mit le monde sous ses lois
Pour dompter tout, se dompta quelquefois
Et devint proie au temps, qui tout consomme.

Rome de Rome est le seul monument,
Et Rome Rome a vaincu seulement.
Le Tibre seul, qui vers la mer s’enfuit,

Reste de Rome. O mondaine inconstance !
Ce qui est ferme est par le temps détruit
Et ce qui fuit, au temps fait résistance.

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Si tu m'en crois, Baïf, tu changeras Parnasse

Si tu m'en crois, Baïf, tu changeras Parnasse
Au palais de Paris, Hélicon au parquet,
Ton laurier en un sac, et ta lyre au caquet
De ceux qui, pour serrer, la main n'ont jamais lasse.

C'est à ce métier-là que les biens on amasse,
Non à celui des vers, où moins y a d'acquêt
Qu'au métier d'un bouffon ou celui d'un naquet.
Fi du plaisir, Baïf, qui sans profit se passe.

Laissons donc, je te prie, ces babillardes soeurs,
Ce causeur Apollon, et ces vaines douceurs,
Qui pour tout leur trésor n'ont que des lauriers verts.

Aux choses de profit, ou celles qui font rire,
Les grands ont aujourd'hui les oreilles de cire,
Mais ils les ont de fer pour écouter les vers.

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Le Babylonien ses hauts murs vantera

Le Babylonien ses hauts murs vantera
Et ses vergers en l'air, de son Ephésienne
La Grèce décrira la fabrique ancienne,
Et le peuple du Nil ses pointes chantera :

La même Grèce encor vanteuse publiera
De son grand Jupiter l'image Olympienne,
Le Mausole sera la gloire Carienne,
Et son vieux Labyrinth' la Créte n'oubliera :

L'antique Rhodien élèvera la gloire
De son fameux Colosse, au temple de Mémoire :
Et si quelque oeuvre encor digne se peut vanter

De marcher en ce rang, quelque plus grand faconde
Le dira : quant à moi, pour tous je veux chanter
Les sept coteaux romains, sept miracles du monde.

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La grecque poésie orgueilleuse se vante

La grecque poésie orgueilleuse se vante
Du los* qu'à son Homère Alexandre donna,
Et les vers que César de Virgile sonna,
La latine aujourd'hui les chante et les rechante.

La française qui n'est tant que ces deux savante,
Comme qui son Homère et son Virgile n'a,
Maintient que le laurier qui François couronna
Baste seul pour la rendre à tout jamais vivante.

Mais les vers qui l'ont mise encore en plus haut prix
Sont les vôtres, Madame, et ces divins écrits
Que mourant nous laissa la reine votre mère.

Ô poésie heureuse, et bien digne des rois,
De te pouvoir vanter des écrits navarrois,
Qui t'honorent trop plus qu'un Virgile ou Homère !

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Ronsard, j'ai vu l'orgueil des colosses antiques

Ronsard, j'ai vu l'orgueil des colosses antiques,
Les théâtres en rond ouverts de tous côtés,
Les colonnes, les arcs, les hauts temples voûtés,
Et les sommets pointus des carrés obélisques.

J'ai vu des empereurs les grands thermes publiques,
J'ai vu leurs monuments que le temps a domptés,
J'ai vu leurs beaux palais que l'herbe a surmontés,
Et des vieux murs romains les poudreuses reliques.

Bref, j'ai vu tout cela que Rome a de nouveau,
De rare, d'excellent, de superbe et de beau :
Mais je n'y ai point vu encore si grand chose

Que cette Marguerite, où semble que les cieux,
Pour effacer l'honneur de tous les siècles vieux,
De leurs plus beaux présents ont l'excellence enclose.

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Au Roi

Ne vous pouvant donner ces ouvrages antiques
Pour votre Saint-Germain ou pour Fontainebleau,
Je vous les donne, Sire, en ce petit tableau
Peint, le mieux que j'ai pu, de couleurs poétiques :

Qui mis sous votre nom devant les yeux publiques,
Si vous le daignez voir en son jour le plus beau,
Se pourra bien vanter d'avoir hors du tombeau
Tiré des vieux Romains les poudreuses reliques.

Que vous puissent les dieux un jour donner tant d'heur,
De rebâtir en France une telle grandeur
Que je la voudrais bien peindre en votre langage :

Et peut-être qu'alors votre grand Majesté,
Repensant à mes vers, dirait qu'ils ont été
De votre monarchie un bienheureux présage.

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Cependant que tu dis ta Cassandre divine,

Cependant que tu dis ta Cassandre divine,
Les louanges du roi, et l'héritier d'Hector,
Et ce Montmorency, notre français Nestor,
Et que de sa faveur Henri t'estime digne :

Je me promène seul sur la rive latine,
La France regrettant, et regrettant encor
Mes antiques amis, mon plus riche trésor,
Et le plaisant séjour de ma terre angevine.

Je regrette les bois, et les champs blondissants,
Les vignes, les jardins, et les prés verdissants
Que mon fleuve traverse : ici pour récompense

Ne voyant que l'orgueil de ces monceaux pierreux,
Où me tient attaché d'un espoir malheureux
Ce que possède moins celui qui plus y pense.

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Astres cruels, et vous dieux inhumains

Astres cruels, et vous dieux inhumains,
Ciel envieux, et marâtre nature,
Soit que par ordre ou soit qu'à l'aventure
Voise le cours des affaires humains,

Pourquoi jadis ont travaillé vos mains
A façonner ce monde qui tant dure ?
Ou que ne fut de matière aussi dure
Le brave front de ces palais romains ?

Je ne dis plus la sentence commune,
Que toute chose au-dessous de la lune
Est corrompable et sujette à mourir :

Mais bien je dis (et n'en veuille déplaire
A qui s'efforce enseigner le contraire)
Que ce grand Tout doit quelquefois périr.

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La châtaigneraie

Gloire à cette rencontre, en ces fonds de la Marche,
Surgissant, après tant de tours et contremarches,
D'une châtaigneraie, immense, en vétusté,
Comblant tout un ravin de son énormité !

Vivent ces châtaigniers, monstres et patriarches,
Lugubres frères noirs en la difformité,
Horrifiant l'endroit par la solennité,
Le morne, et le croulant de leurs rameaux en arches !

Grave, tombe au sol frais leur grande ombre qui marche
Sur des cèpes suintant leur venin fermenté.
Vivent ces châtaigniers, monstres et patriarches,
Lugubres frères noirs en la difformité !

Leurs troncs où les renflés d'écorce font des marches,
Moussus, ont pour l'orfraie un escalier ouaté,
Et la sifflante bête, à la torse démarche,
Trouve, en leur gros pied cave, abri, sécurité.
Vivent ces châtaigniers, monstres et patriarches !

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La nef qui longuement a voyagé, Dillier

La nef qui longuement a voyagé, Dillier,
Dedans le sein du port à la fin on la serre :
Et le boeuf, qui longtemps a renversé la terre,
Le bouvier à la fin lui ôte le collier :

Le vieux cheval se voit à la fin délier,
Pour ne perdre l'haleine ou quelque honte acquerre :
Et pour se reposer du travail de la guerre,
Se retire à la fin le vieillard chevalier :

Mais moi, qui jusqu'ici n'ai prouvé que la peine,
La peine et le malheur d'une espérance vaine,
La douleur, le souci, les regrets, les ennuis,

Je vieillis peu à peu sur l'onde ausonienne,
Et si n'espère point, quelque bien qui m'advienne,
De sortir jamais hors des travaux où je suis.

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Les Clochettes

Maintenant, je suis malheureux
De rencontrer ces fleurs clochettes
À bords dentelés, violettes,
Sur les talus des chemins creux.

Et pourtant ces douces fluettes
Sont encor dans leur coin frileux,
Le perchoir des papillons bleus
Qui s’en font des escarpolettes.

Mais qu’importe ! La canicule
Tire à sa fin. L’été recule...
Et, pour l’oreille de mon cœur

Inquiet et pronostiqueur,
À petits tintements moroses
Ces fleurs sonnent le glas des choses.

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Les clochettes

Maintenant, je suis malheureux
De rencontrer ces fleurs clochettes
A bords dentelés, violettes,
Sur les talus des chemins creux.

Et pourtant ces douces fluettes
Sont encor dans leur coin frileux,
Le perchoir des papillons bleus
Qui s'en font des escarpolettes.

Mais qu'importe ! La canicule
Tire à sa fin. L'été recule...
Et, pour l'oreille de mon coeur

Inquiet et pronostiqueur,
A petits tintements moroses
Ces fleurs sonnent le glas des choses.

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D'un vanneur de blé aux vents

A vous, troupe légère,
Qui d'aile passagère
Par le monde volez,
Et d'un sifflant murmure
L'ombrageuse verdure
Doucement ébranlez,

J'offre ces violettes,
Ces lis et ces fleurettes,
Et ces roses ici,
Ces vermeillettes roses,
Tout fraîchement écloses,
Et ces oeillets aussi.

De votre douce haleine
Éventez cette plaine,
Éventez ce séjour,
Cependant que j'ahanne
A mon blé que je vanne
A la chaleur du jour.

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Mon âme est une infante

Mon Ame est une infante en robe de parade,
Dont l'exil se reflète, éternel et royal,
Aux grands miroirs déserts d'un vieil Escurial,
Ainsi qu'une galère oubliée en la rade.

Aux pieds de son fauteuil, allongés noblement,
Deux lévriers d'Écosse aux yeux mélancoliques
Chassent, quand il lui plaît, les bêtes symboliques
Dans la forêt du Rêve et de l'Enchantement.

Son page favori, qui s'appelle Naguère,
Lui lit d'ensorcelants poèmes à mi-voix,
Cependant qu'immobile, une tulipe aux doigts,
Elle écoute mourir en elle leur mystère...

Le parc alentour d'elle étend ses frondaisons,
Ses marbres, ses bassins, ses rampes à balustres;
Et, grave, elle s'enivre à ces songes illustres
Que recèlent pour nous les nobles horizons.

Elle est là résignée, et douce, et sans surprise,
Sachant trop pour lutter comme tout est fatal,
Et se sentant, malgré quelque dédain natal,
Sensible à la pitié comme l'onde à la brise.

Elle est là résignée, et douce en ses sanglots,
Plus sombre seulement quand elle évoque en songe
Quelque Armada sombrée à l'éternel mensonge,
Et tant de beaux espoirs endormis sous les flots.

Des soirs trop lourds de pourpre où sa fierté soupire,
Les portraits de Van Dyck aux beaux doigts longs et purs,
Pâles en velours noir sur l'or vieilli des murs,
En leurs grands airs défunts la font rêver d'empire.

Les vieux mirages d'or ont dissipé son deuil,
Et, dans les visions où son ennui s'échappe,
Soudain - gloire ou soleil -un rayon qui la frappe
Allume en elle tous les rubis de l'orgueil.

Mais d'un sourire triste elle apaise ces fièvres;
El, redoutant la foule aux tumultes de fer,
Elle écoute la vie - au loin - comme la mer...
Et le secret se lait plus profond sur ses lèvres.

Rien n'émeut d'un frisson l'eau pâle de ses yeux,
Où s'est assis l'Esprit voilé des Villes mortes;
El par les salles, où sans bruit tournent les portes,
Elle va, s'enchantant de mots mystérieux.

L'eau vaine des jets d'eau là-bas tombe en cascade,
Et, pâle à la croisée, une tulipe aux doigts,
Elle est là, reflétée aux miroirs d'autrefois,
Ainsi qu'une galère oubliée en la rade.

Mon Ame est une infante en robe de parade.

poésie de Albert SamainSignalez un problèmeDes citations similaires
Ajouté par Simona Enache
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Comme on passe en été le torrent sans danger,

Comme on passe en été le torrent sans danger,
Qui soulait en hiver être roi de la plaine,
Et ravir par les champs d'une fuite hautaine
L'espoir du laboureur et l'espoir du berger :

Comme on voit les couards animaux outrager
Le courageux lion gisant dessus l'arène,
Ensanglanter leurs dents, et d'une audace vaine
Provoquer l'ennemi qui ne se peut venger :

Et comme devant Troie on vit des Grecs encor
Braver les moins vaillants autour du corps d'Hector :
Ainsi ceux qui jadis soulaient, à tête basse,

Du triomphe romain la gloire accompagner,
Sur ces poudreux tombeaux exercent leur audace,
Et osent les vaincus les vainqueurs dédaigner.

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Le Ravin des coquelicots

Dans un creux sauvage et muet
Qui n’est pas connu du bluet
Ni de la chèvre au pied fluet
Ni de personne,
Loin des sentiers des bourriquots,
Loin des bruits réveilleurs d’échos,
Un fouillis de coquelicots
Songe et frissonne.

Autour d’eux, d’horribles étangs
Ont des reflets inquiétants ;
À peine si, de temps en temps,
Un lézard bouge
Entre les genêts pleins d’effrois
Et les vieux buis amers et froids
Qui fourmillent sur les parois
Du ravin rouge.

Le ciel brillant comme un vitrail
N’épand qu’un jour de soupirail
Sur leurs lamettes de corail
Ensorcelées,
Mais dans la roche et le marais
Ils sont écarlates et frais
Comme leurs frères des forêts
Et des vallées.

Ils bruissent dans l’air léger
Sitôt que le temps va changer.
Au moindre aquilon passager
Qui les tapote,
Et se démènent tous si fort
Sous le terrible vent du Nord
Qu’on dirait du sang qui se tord
Et qui clapote.

En vain, descendant des plateaux
Et de la cime des coteaux,
Sur ces lumineux végétaux
L’ombre se vautre,
Dans un vol preste et hasardeux,
Des libellules deux à deux
Tournent et vibrent autour d’eux
L’une sur l’autre.

Frôlés des oiseaux rebâcheurs
Et des sidérales blancheurs,
Ils poussent là dans les fraîcheurs
Et les vertiges,
Aussi bien que dans les sillons ;
Et tous ces jolis vermillons
Tremblent comme des papillons
Au bout des tiges.

Leur chaude couleur de brasier
Réjouit la ronce et l’osier ;
Et le reptile extasié,
L’arbre qui souffre,
Les rochers noirs privés d’azur
Ont un air moins triste et moins dur
Quand ils peuvent se pencher sur
Ces fleurs du gouffre.

Les carmins et les incarnats,
La pourpre des assassinats,
Tous les rubis, tous les grenats
Luisent en elles ;
C’est pourquoi, par certains midis,
Leurs doux pétales attiédis
Sont le radieux paradis
Des coccinelles.

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Ceux qui sont amoureux, leurs amours chanteront,

Ceux qui sont amoureux, leurs amours chanteront,
Ceux qui aiment l'honneur, chanteront de la gloire,
Ceux qui sont près du roi, publieront sa victoire,
Ceux qui sont courtisans, leurs faveurs vanteront,

Ceux qui aiment les arts, les sciences diront,
Ceux qui sont vertueux, pour tels se feront croire,
Ceux qui aiment le vin, deviseront de boire,
Ceux qui sont de loisir, de fables écriront,

Ceux qui sont médisants, se plairont à médire,
Ceux qui sont moins fâcheux, diront des mots pour rire,
Ceux qui sont plus vaillants, vanteront leur valeur,

Ceux qui se plaisent trop, chanteront leur louange,
Ceux qui veulent flatter, feront d'un diable un ange :
Moi, qui suis malheureux, je plaindrai mon malheur.

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Tristesse des bœufs

Voilà ce que me dit en reniflant sa prise
Le bon vieux laboureur, guêtré de toile grise.
Assis sur un des bras de sa charrue, ayant
Le visage en regard du soleil rougeoyant :

« Ces pauv’ bêt’ d’animaux n’comprenn’ pas q’ la parole.
T’nez ! j’avais deux bœufs noirs !... Pour labourer un champ
C’était pas d’ leur causer ; non ! leur fallait du chant
Qui s’ mêle au souffl’ de l’air, aux cris d’ l’oiseau qui vole !

Alors, creusant l’ sillon entr’ buissons, chên’s et viornes,
Vous les voyiez filer, ben lent’ment, dans ceux fonds,
Tels que deux gros lumas, l’un cont’ l’aut’, qui s’en vont
Ayant tiré d’ leu têt’ tout’ la longueur des cornes.

L’ sillon fini, faisant leur demi-rond d’eux-mêmes,
I’s en r’commençaient un auprès, juste à l’endroit :
J’avais qu’à l’ver l’soc qui, rentré doux, r’glissait droit...
Ainsi, toujours pareil, du p’tit jour au soir blême.

C’était du bel ouvrage aussi m’suré q’ leur pas,
Q’ ça soit pour le froment, pour l’avoin’, pour le seigle,
Tous ces sillons étaient jumeaux, droits comme un’ règle,
Et l’écart entr’ chacun comm’ pris par un compas.

Par exempl’, fallait pas, dam’ ! q’ la chanson les quitte !
À preuv’ que quand, des fois, j’ la laissais pour prend’ vent,
I’ s’arrêtaient d’un coup, r’tournaient l’ mufle en bavant,
Et beurmaient tous les deux pour en d’mander la suite.

Mais, c’est pas tout encor, dans l’air de la chanson
I v’laient d’ la même tristesse ayant toujou l’ mêm’ son,
À cell’ du vent et d’ l’arb’ toujou ben accordée.
Mais d’ la gaieté ? jamais i’ n’en voulur’ un brin !

Ça tombait ben pour moi qui chantais mon chagrin.
Ya donc des animaux qu’ont du choix dans l’idée
Et qu’ont l’ naturel trist’ puisque, jamais joyeux,
Dans la couleur des bruits c’est l’noir qu’i’s aim’ le mieux.

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