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À la Circé moderne

Puisqu’un irrésistible appeau
Attire à toi toute mon âme,
Et que toute ma chair proclame
Le magnétisme de ta peau :
Irrite, mais sans le proscrire,
Le désir qui me ronge, et puis
Viens emparadiser mes nuits,
Ensorceleuse au froid sourire.

Aux bruits mouillés, tendres et fous
De nos baisers démoniaques,
Comme deux serpents maniaques
Dans le mystère enlaçons-nous !
Chère onduleuse, mauvais ange,
Abeille de la volupté,
Donne-moi ton corps enchanté
Et reçois mon âme en échange !

Mon désir s’enroule et se tord
Autour de ton beau corps de marbre,
— Ainsi le lierre autour de l’arbre —
Horrible et doux, il rampe et mord.
Tes grands yeux caves et funèbres
Sont si libertins quand tu veux,
Et j’aspire dans tes cheveux
Tant de parfums et de ténèbres !

Moderne Circé, tes poisons
Auraient perdu le cœur d’Ulysse ;
Harcèle-moi de ta malice,
Salis-moi de tes trahisons !
Insulte-moi ! mais, ma maîtresse,
Laisse-moi repaître ma faim,
Dussé-je mourir à la fin,
Empoisonné par ta caresse !

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L'Ange gardien

Archange féminin dont le bel œil, sans trêve,
Miroite en s’embrumant comme un soleil navré,
Apaise le chagrin de mon cœur enfiévré,
Reine de la douceur, du silence et du rêve.

Inspire-moi l’effort qui fait qu’on se relève,
Enseigne le courage à mon corps éploré,
Sauve-moi de l’ennui qui me rend effaré,
Et fourbis mon espoir rouillé comme un vieux glaive.

Rallume à ta gaîté mon pauvre rire éteint ;
Use en moi le vieil homme, et puis, soir et matin,
Laisse-moi t’adorer comme il convient aux anges !

Laisse-moi t’adorer loin du monde moqueur,
Au bercement plaintif de tes regards étranges,
Zéphyrs bleus charriant les parfums de ton cœur !

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À une Mystérieuse

J’aime tes longs cheveux et tes pâles menottes,
Tes petits pieds d’enfant, aux ongles retroussés,
Tes yeux toujours pensifs et jamais courroucés,
Ta bouche de velours et tes fines quenottes.

Puis, j’adore ton cœur où, comme des linottes,
Gazouillent à loisir tes rêves cadencés ;
Ton cœur, aux sentiments touffus et nuancés,
Et ton esprit qui jase avec toutes les notes.

Ton frôlement me fait tressaillir jusqu’aux os
Et dans ses regards pleins d’invisibles roseaux
Ta prunelle mystique enveloppe mon âme :

Donc, tu m’as tout entier, tu me subjugues ! Mais,
En toi, je ne sais pas et ne saurai jamais
Ce que j’aime le mieux de l’Ange ou de la Femme !

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Les Seins

J’ai fait ces vers subtils, polis comme des bagues,
Pour immortaliser la gloire de tes seins
Que mon houleux désir bat toujours de ses vagues.

Qu’ils y fleurissent donc éternellement sains,
Et que dans la roideur fière des pics de glace
Ils narguent à jamais les siècles assassins !

Sur ta chemise, enfant, mon Å“il baise la place
Qu’use le frottement de leurs boutons rosés,
Et voilà que déjà le vertige m’enlace.

Si j’osais ! Tu souris, semblant me dire : « Osez !
Mes seins voluptueux sont friands de vos lèvres
Et de larmes d’amour veulent être arrosés. »

Et pour m’indemniser des nuits où tu m’en sèvres,
Tu ne les caches plus que sous tes noirs cheveux
Drus comme les buissons que mordillent les chèvres.

Ivresse ! Ils sont alors à moi tant que je veux :
Car mes doigts chatouilleurs ont des caresses lentes
S’entrecoupant d’arrêts et de frissons nerveux.

Et quand vibrent sur vous mes lèvres harcelantes,
Libellules d’amour dont vous êtes les fleurs,
Votre incarnat rougit, pointes ensorcelantes !

Rubis des seins, vous en rehaussez les pâleurs
Et vous vous aiguisez, jusqu’à piquer ma joue
Comme le bec lutin des oiselets siffleurs.

Et tu frémis avec une adorable moue
Tandis qu’au cliquetis de tes bracelets d’or
Ta main dans ma crinière indomptable se joue !

En vain la bise hurle au fond du corridor,
Tu souris de langueur sur le sopha d’ébène
Devant l’âtre paisible où la flamme s’endort.

Moi, je brûle affolé, je me contiens à peine ;
Et pourtant mon désir qui rampe à tes genoux
Sait que sa patience a toujours bonne aubaine.

Mais tu laisses tomber ton provocant burnous,
Et, moderne houri des paradis arabes,
Tu bondis toute nue en criant : « Aimons-nous ! »

Oh ! comme nous râlons ces magiques syllabes,
Dans la chère seconde où, pour mieux s’enlacer,
Nos jambes et nos bras sont des pinces de crabes !

Ma convoitise enfin peut donc se harasser !
Pas un coin de ton corps où mes lèvres ne paissent
Tu me bois, je t’aspire ! et, pour me délasser,

J’admire tes beaux seins qui s’enflent et s’abaissent.

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La Chanson des yeux

J’aime tes yeux d’azur qui, tout pailletés d’or,
Ont une lueur bleue et blonde,
Tes yeux câlins et clairs où le rêve s’endort,
Tes grands yeux bougeurs comme l’onde.

Jusque dans leurs regards savants et nuancés,
Si doux qu’ils te font deux fois femme,
Ils reflètent le vol de tes moindres pensers
Et sont les vitres de ton âme.

Dans la rue on subit leur charme ensorceleur ;
Ils étonnent sur ton passage,
Car ils sont plus jolis et plus fleurs que la fleur
Que tu piques à ton corsage.

Oui, tes yeux sont si frais sous ton large sourcil,
Qu’en les voyant on se demande
S’ils n’ont pas un arôme harmonieux aussi,
Tes longs yeux fendus en amande.

Dans le monde on les voit pleins de morosité,
Ils sont distraits ou sardoniques
Et n’ont pour me parler amour et volupté
Que des Å“illades platoniques ;

Mais, tout seuls avec moi sous les rideaux tremblants,
Ils me font te demander grâce,
Et j’aspire, enlacé par tes petits bras blancs,
Ce qu’ils me disent à voix basse.

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Les Petits Souliers

Tes petits souliers noirs grillés comme une cage
Emprisonnent tes pieds plus vifs que des oiseaux,
Laissant voir à travers leurs délicats réseaux
Tes bas coloriés fleuris comme un langage.

Ils ont le glissement du vent dans le bocage,
La grâce tournoyeuse et grêle des fuseaux,
L’air mutin de l’abeille aux pointes des roseaux
Ou de la sauterelle au milieu d’un pacage.

En vain, ils sont partout mes suiveurs familiers,
Par l’aspect et le bruit de tes petits souliers
J’ai toujours les yeux pris et l’oreille conquise ;

Et quand les mauvais jours me séparent de toi,
Ton souvenir les fait sonner derrière moi
Et brode sur mon cœur leur silhouette exquise.

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À l'Insensible

Es-tu femme ou statue ? Hélas ! j’ai beau m’user
Par les raffinements inouïs que j’invente
Pour forcer ta chair morte à devenir vivante ;
J’ai beau me convulser sur ta gorge énervante,
Tu n’as jamais senti la luxure savante
De mon baiser.

Ainsi donc, comme un plomb sur la peau du jaguar,
Ma passion sur toi glisse, et mes pleurs eux-mêmes
Coulent sans t’émouvoir le long de tes mains blêmes ;
Et quand je te supplie à genoux que tu m’aimes,
Je reste épouvanté par les froideurs suprêmes
De ton regard !

Rampant comme un aspic, fidèle comme un chien,
Je laisse piétiner mon cœur sous ta babouche ;
Devant l’inconscient sarcasme de ta bouche,
Je fléchis mon honneur et ma fierté farouche ;
Je me calcine en vain dans l’enfer de ta couche,
Ô rage ! — Eh bien,

Puisque sur ton flanc nu l’amour me fait beugler,
Sans que jamais sur toi ma convoitise morde ;
Puisque toujours passive et sans miséricorde,
Tu veux qu’en tes bras morts et glacés je me torde,
Ce soir, de tes cheveux, je vais faire une corde
Pour t’étrangler !

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Les Yeux bleus

Tes yeux bleus comme deux bluets
Me suivaient dans l’herbe fanée
Et près du lac aux joncs fluets
Où la brise désordonnée
Venait danser des menuets.

Chère Ange, tu diminuais
Les ombres de ma destinée,
Lorsque vers moi tu remuais
Tes yeux bleus.

Mes spleens, tu les atténuais,
Et ma vie était moins damnée
À cette époque fortunée
Où dans l’âme, à frissons muets,
Tendrement tu m’insinuais
Tes yeux bleus !

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Charles Baudelaire

Le Balcon

Mère des souvenirs, maîtresse des maîtresses,
Ô toi, tous mes plaisirs! ô toi, tous mes devoirs!
Tu te rappelleras la beauté des caresses,
La douceur du foyer et le charme des soirs,
Mère des souvenirs, maîtresse des maîtresses!

Les soirs illuminés par l'ardeur du charbon,
Et les soirs au balcon, voilés de vapeurs roses.
Que ton sein m'était doux! que ton coeur m'était bon!
Nous avons dit souvent d'impérissables choses
Les soirs illuminés par l'ardeur du charbon.

Que les soleils sont beaux dans les chaudes soirées!
Que l'espace est profond! que le coeur est puissant!
En me penchant vers toi, reine des adorées,
Je croyais respirer le parfum de ton sang.
Que les soleils sont beaux dans les chaudes soirées!

La nuit s'épaississait ainsi qu'une cloison,
Et mes yeux dans le noir devinaient tes prunelles,
Et je buvais ton souffle, ô douceur! ô poison!
Et tes pieds s'endormaient dans mes mains fraternelles.
La nuit s'épaississait ainsi qu'une cloison.

Je sais l'art d'évoquer les minutes heureuses,
Et revis mon passé blotti dans tes genoux.
Car à quoi bon chercher tes beautés langoureuses
Ailleurs qu'en ton cher corps et qu'en ton coeur si doux?
Je sais l'art d'évoquer les minutes heureuses!

Ces serments, ces parfums, ces baisers infinis,
Renaîtront-ils d'un gouffre interdit à nos sondes,
Comme montent au ciel les soleils rajeunis
Après s'être lavés au fond des mers profondes?
— Ô serments! ô parfums! ô baisers infinis!

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Charles Baudelaire

À une Madone

Ex-voto dans le goût espagnol

Je veux bâtir pour toi, Madone, ma maîtresse,
Un autel souterrain au fond de ma détresse,
Et creuser dans le coin le plus noir de mon coeur,
Loin du désir mondain et du regard moqueur,
Une niche, d'azur et d'or tout émaillée,
Où tu te dresseras, Statue émerveillée.
Avec mes Vers polis, treillis d'un pur métal
Savamment constellé de rimes de cristal
Je ferai pour ta tête une énorme Couronne;
Et dans ma Jalousie, ô mortelle Madone
Je saurai te tailler un Manteau, de façon
Barbare, roide et lourd, et doublé de soupçon,
Qui, comme une guérite, enfermera tes charmes,
Non de Perles brodé, mais de toutes mes Larmes!
Ta Robe, ce sera mon Désir, frémissant,
Onduleux, mon Désir qui monte et qui descend,
Aux pointes se balance, aux vallons se repose,
Et revêt d'un baiser tout ton corps blanc et rose.
Je te ferai de mon Respect de beaux Souliers
De satin, par tes pieds divins humiliés,
Qui, les emprisonnant dans une molle étreinte
Comme un moule fidèle en garderont l'empreinte.
Si je ne puis, malgré tout mon art diligent
Pour Marchepied tailler une Lune d'argent
Je mettrai le Serpent qui me mord les entrailles
Sous tes talons, afin que tu foules et railles
Reine victorieuse et féconde en rachats
Ce monstre tout gonflé de haine et de crachats.
Tu verras mes Pensers, rangés comme les Cierges
Devant l'autel fleuri de la Reine des Vierges
Etoilant de reflets le plafond peint en bleu,
Te regarder toujours avec des yeux de feu;
Et comme tout en moi te chérit et t'admire,
Tout se fera Benjoin, Encens, Oliban, Myrrhe,
Et sans cesse vers toi, sommet blanc et neigeux,
En Vapeurs montera mon Esprit orageux.

Enfin, pour compléter ton rôle de Marie,
Et pour mêler l'amour avec la barbarie,
Volupté noire! des sept Péchés capitaux,
Bourreau plein de remords, je ferai sept Couteaux
Bien affilés, et comme un jongleur insensible,
Prenant le plus profond de ton amour pour cible,
Je les planterai tous dans ton Coeur pantelant,
Dans ton Coeur sanglotant, dans ton Coeur ruisselant!

poésie de Charles Baudelaire de Les Fleurs du malSignalez un problèmeDes citations similaires
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Iulia Hașdeu

Je n’ose

je veux te dire une chose
si tu pouvais m’ecouter!
tu m’ecoutes... mais je n’ose
non, je n’ose te parler.
je te sais bonne et tres douce:
mais je te crains malgre moi.
l’oiseau tremble dans la mousse
et je tremble devant toi.

j’ai bien des choses a dire
mais je ne peux pas, j’ai peur...
je te vois deja sourire
et ton sourire est moqueur.
ta bouche est comme une rose...
tu vas te railler de moi
je suis si gauche et je n’ose
lever les yeux devant toi!

ton port est un port de reine
ton regard est imposant
alors, tu comprends sans peine
pourquoi je t’admire tant
je te voudrais souveraine
et moi je serais ton roi
meme etant sur de ta haine
j’aimerais mourir pour toi

je suis bete, c’est possible
pourtant, je sais bien aimer
mon cœur n’est pas insensible
mais je ne puis m’exprimer
ah! si je savais te dire
l’amour que je sens pour toi
non, tu ne voudrais plus rire
et tu n’aimerais que moi.

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L'Abandonnée

La belle en larmes
Pleure l’abandon de ses charmes
Dont un volage enjôleur
A cueilli la fleur.
Elle sanglote
Au bord de l’onde qui grelotte
Sous les peupliers tremblants,
Pendant que son regard flotte
Et se perd sous les nénufars blancs.

« Adieu ! dit-elle,
Ô toi qui me fus infidèle.
Je t’offre, avant de mourir,
Mon dernier soupir.
Je te pardonne,
Aussi douce que la Madone,
Je te bénis par ma mort.
Le trépas que je me donne,
Pour mon cœur c’est ton amour encor.

Mon souvenir tendre
Sait toujours te voir et t’entendre
Et, par lui, rien n’est effacé
Du bonheur passé.
Nos doux libertinages
Dans les ravins, sous les feuillages,
Au long des ruisseaux tortueux,
Sont encor de claires images
Revenant aux appels de mes yeux.

Ton fruit que je porte
Dans mon ventre de bientôt morte,
C’est toi-même, tes os, ton sang,
Ô mon cher amant !
Traits pour traits, il me semble
Si bien sentir qu’il te ressemble !
Je ne fais donc qu’une avec toi ;
Je me dis que, fondus ensemble,
Tu mourras en même temps que moi. »

Puis, blême et hagarde,
Elle se penche, elle regarde
Le plus noir profond de l’eau
Qui sera son tombeau.
Elle se pâme
Devant le gouffre qui la réclame,
Et dit le nom, en s’y jetant,
De l’homme qu’elle aimait tant
Que, sans lui, son corps n’avait plus d’âme !

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Les Martyrs

L’Horreur et le Dégoût lui bavaient leur poison
Quand la Vieille emmenait sa Manon toute pâle,
Car, un instant après, derrière la cloison,
Il entendait deux voix suffoquer dans un râle.

Ainsi donc ! grinçait-il, le voilà ton destin :
Jusqu’à ce que la mort t’arrache au dispensaire,
Tu pourriras ton cœur dans l’ennui libertin
Et tu vendras ton corps attendu par l’ulcère !

Et moi, j’irais toujours, sans trêve à mes tourments,
Cogner ma jalousie à ton peuple d’amants !
Non ! je hais ta jeunesse et je maudis tes charmes !

Mais il avait pitié de ses pauvres amours
Quand il voyait entrer par la porte en velours
Une apparition ruisselante de larmes.

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Charles Baudelaire

À une Malabaraise

Tes pieds sont aussi fins que tes mains, et ta hanche
Est large à faire envie à la plus belle blanche;
À l'artiste pensif ton corps est doux et cher;
Tes grands yeux de velours sont plus noirs que ta chair.
Aux pays chauds et bleus où ton Dieu t'a fait naître,
Ta tâche est d'allumer la pipe de ton maître,
De pourvoir les flacons d'eaux fraîches et d'odeurs,
De chasser loin du lit les moustiques rôdeurs,
Et, dès que le matin fait chanter les platanes,

D'acheter au bazar ananas et bananes.
Tout le jour, où tu veux, tu mènes tes pieds nus,
Et fredonnes tout bas de vieux airs inconnus;
Et quand descend le soir au manteau d'écarlate,
Tu poses doucement ton corps sur une natte,
Où tes rêves flottants sont pleins de colibris,
Et toujours, comme toi, gracieux et fleuris.

Pourquoi, l'heureuse enfant, veux-tu voir notre France,
Ce pays trop peuplé que fauche la souffrance,
Et, confiant ta vie aux bras forts des marins,
Faire de grands adieux à tes chers tamarins?
Toi, vêtue à moitié de mousselines frêles,
Frissonnante là-bas sous la neige et les grêles,
Comme tu pleurerais tes loisirs doux et francs
Si, le corset brutal emprisonnant tes flancs
Il te fallait glaner ton souper dans nos fanges
Et vendre le parfum de tes charmes étranges,
Oeil pensif, et suivant, dans nos sales brouillards,
Des cocotiers absents les fantômes épars!

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La Relique

Avant son mariage, – ô souffrance mortelle !
Elle me la donna sa chemise en dentelle,
Celle qu’elle avait le doux soir
Où, cédant à mes pleurs qui lui disaient : « Viens, Berthe ! »
Près de moi haletant sur la couche entr’ouverte,
Frémissante elle vint s’asseoir.

Ce linge immaculé qu’embaumait son corps vierge,
Quand elle vint me faire, aussi pâle qu’un cierge,
Ses chers adieux si redoutés,
Elle me le tendit d’un air mélancolique
En soupirant : « Voici la suprême relique
De nos défuntes voluptés.

« Je te la donne, ami, ma chemise brodée :
Car, la première fois que tu m’as possédée,
Je la portais, t’en souviens-tu ?
Elle seule a connu les brûlantes ivresses
Que ta voix musicale et pleine de caresses
Faisait courir dans ma vertu.

« Elle seule entendit les aveux réciproques
Que, jour et nuit, mes seins, dans leurs gentils colloques,
Échangeaient tout bas en tremblant ;
Elle seule a pu voir comme une vierge flambe
Quand le genou d’un homme ose effleurer sa jambe
Qui tressaille dans son bas blanc.

« Dès l’heure où sur mon cou frémit ta lèvre ardente,
Tout mon corps anxieux a pris pour confidente
Cette chemise en tulle fin ;
Et ses sensations aussi neuves qu’impures,
Voluptueusement, dans le flot des guipures,
Ont dit qu’il se donnait enfin.

« Conserve-la toujours ! Qu’elle soit pour ton âme
La chair mystérieuse et vague de la femme
Qui te voue un culte éternel ;
Qu’elle soit l’oreiller de tes regrets moroses ;
Quand tu la baiseras, songe aux nudités roses
Qui furent ton festin charnel !

« Que les parfums ambrés de ma peau qui l’imprègnent,
Pour l’odorat subtil de tes rêves, y règnent
Candides et luxurieux !
Qu’elle garde à jamais l’empreinte de mes formes !
J’ai dit à mon amour : « J’exige que tu dormes
« Entre ses plis mystérieux. »

« Les chaleurs, les frissons de ma chair en alarmes,
Quand ma virginité rouge et buvant ses larmes
Te fuyait comme un assassin,
Ce que j’ai ressenti de bonheur et de crainte
Quand tu m’as attirée et que tu m’as étreinte
En collant ta bouche à mon sein :

« Elle t’apprendra tout ! Dans ses muettes odes,
Elle rappellera d’amoureux épisodes
À ton hallucination ;
Et ton rêve, y trouvant mes bien-aimés vestiges,
Bénira, l’aile ouverte au milieu des vertiges,
Sa chère fascination.

« Adieu ! » – J’ai conservé la mignonne chemise
Je l’exhume parfois du coffre où je l’ai mise,
Et je la baise avec ferveur ;
Et mon rêve est si chaud, qu’en elle il fait revivre
Ce corps si capiteux dont je suis encore ivre,
Car il m’en reste la saveur.

Alors, je la revois dans un nimbe de gloire,
La sirène aux pieds blancs comme du jeune ivoire,
Mon ancienne adoration,
Qui, moderne païenne, ingénue et lascive,
Allumait d’un regard dans mon âme pensive
Des fournaises de passion.

Son corps de Grecque, ayant l’ardeur de la Créole,
Tour à tour délirant et plein de langueur molle,
Toujours affamé de plaisir,
Et qui, reptile humain, se tordait dans l’alcôve,
Bouillant d’une hystérie irrésistible et fauve
Pour éterniser mon désir ;

Sa bouche de corail, humide et parfumée,
Ses petits pieds d’enfant, ses deux jambes d’almée,
Sa chevelure aux flots houleux,
Sa gorge aiguë et ferme, et ses robustes hanches,
Ses secrètes beautés purpurines et blanches,
Ses yeux immenses, noirs et bleus ;

Tous ces mille rayons d’une chair si féline
Embrasent ma chair froide et toujours orpheline
Depuis que l’amour m’a quitté ;
Et lui criant : « Ma Berthe ! enlaçons-nous sans trêve ! »
Je la possède encor dans l’extase du rêve
Comme dans la réalité !

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Nichita Stănescu

Mon âme, Psyché

Un ange est venu et m’a dit:
- T’es un porc de chien,
vermine et groin.
L’herbe pue sous ton ombre
qui lui pèse.
Et ton haleine sent la boue!
- Mais pourquoi, lui criais-je, pourquoi?
- Sans raison!
Un ange est venu et m’a dit:
- Le verre est plus transparent
que la plus limpide de tes pensées!
Après ta mort, les vers
grouilleront dans tes narines, dans ta gueule,
dans ton groin, dans ta trompe!
- Pourquoi, lui criais-je, pourquoi?
- Sans raison, m’a-t-il répondu...
Puis l’ange, ah, l’ange, ah, l’ange, ah, l’ange,
s’envola, ses ailes d’or flottant
dans l’air d’or.
Des papillons d’or
voltigeaient dans l’aura de l’ange d’or.
Il volait ahuri,
tout en or,
s’éloignant aux lointains mordorés
où sombrait un soleil baigné d’or.
- Pourquoi t’éloignes-tu de moi,
lui criais-je, pourquoi me quittes-tu, pourquoi?
- Sans raison, m’a-t-il répondu. Sans raison...

poésie de Nichita Stănescu de Dans le doux style classique (1970), traduction par Lucia SotirovaSignalez un problèmeDes citations similaires
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Je suis malade

Je ne rêve plus je ne fume plus
Je n'ai même plus d'histoire
Je suis sale sans toi
Je suis laide sans toi
Je suis comme un orphelin dans un dortoir

Je n'ai plus envie de vivre dans ma vie
Ma vie cesse quand tu pars
Je n'aie plus de vie et même mon lit
Ce transforme en quai de gare
Quand tu t'en vas

Je suis malade
Complètement malade
Comme quand ma mère sortait le soir
Et qu'elle me laissait seul avec mon désespoir

Je suis malade parfaitement malade
T'arrive on ne sait jamais quand
Tu repars on ne sait jamais où
Et ça va faire bientôt deux ans
Que tu t'en fous

Comme à un rocher
Comme à un péché
Je suis accroché à toi
Je suis fatigué je suis épuisé
De faire semblant d'être heureuse quand ils sont là

Je bois toutes les nuits
Mais tous les whiskies
Pour moi on le même goût
Et tous les bateaux portent ton drapeau
Je ne sais plus où aller tu es partout

Je suis malade
Complètement malade
Je verse mon sang dans ton corps
Et je suis comme un oiseau mort quand toi tu dors

Je suis malade
Parfaitement malade
Tu m'as privé de tous mes chants
Tu m'as vidé de tous mes mots
Pourtant moi j'avais du talent avant ta peau

Cet amour me tue
Si ça continue je crèverai seul avec moi
Près de ma radio comme un gosse idiot
Écoutant ma propre voix qui chantera

Je suis malade
Complètement malade
Comme quand ma mère sortait le soir
Et qu'elle me laissait seul avec mon désespoir

Je suis malade
C'est ça je suis malade
Tu m'as privé de tous mes chants
Tu m'as vidé de tous mes mots
Et j'ai le coeur complètement malade
Cerné de barricades
T'entends je suis malade.

chanson interprété par DalidaSignalez un problèmeDes citations similaires
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Esprit royal, qui prends de lumière éternelle

Esprit royal, qui prends de lumière éternelle
Ta seule nourriture et ton accroissement,
Et qui de tes beaux rais en notre entendement
Produis ce haut désir qui au ciel nous rappelle,

N'aperçois-tu combien par ta vive étincelle
La vertu luit en moi ? n'as-tu point sentiment
Par l'oeil, l'ouïe, l'odeur, le goût, l'attouchement,
Que sans toi ne reluit chose aucune mortelle ?

Au seul objet divin de ton image pure
Se meut tout mon penser, qui par la souvenance
De ta haute bonté tellement se rassure,

Que l'âme et le vouloir ont pris même assurance
(Chassant tout appétit et toute vile cure)
De retourner au lieu de leur première essence.

poésie de Joachim du BellaySignalez un problèmeDes citations similaires
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La Bête

En amour, l’homme est la souris
Pour qui toute femme est la chatte.
Le sot ne voit pas l’ongle gris
Sous le doux velours de la patte.

Il pompe, le pauvre imprudent,
La chère moiteur qui l’arrose,
Sans songer qu’une horrible dent
Est derrière la langue rose.

Je vous le dis en vérité,
Savant, philosophe, poète :
On s’emplit d’animalité
En se frottant à cette bête.

La femme sur qui les soupçons
Aiguisent leur âpre souffrance,
N’est qu’un abîme de frissons
Où s’engloutit notre espérance.

Depuis l’orteil jusqu’aux cheveux,
Toute femme est une Aspasie,
Disant : « Moi, l’amour que je veux,
« C’est un amour de fantaisie.

« J’ai toujours un nouveau désir
« Dans mes veilles et dans mes sommes ;
« Je suis la mouche du plaisir
« Papillonnant d’hommes en hommes ;

« Le mâle que j’ai convoité,
« Je l’aime, jusqu’à concurrence
« D’une ou deux nuits de volupté,
« Et puis mon amour devient rance.

« J’ai dans le crâne un réservoir
« De larmes, filles du caprice ;
« Pour bien manier le mouchoir,
« Je n’ai pas besoin d’être actrice.

« Ma poitrine est un arsenal
« Où pendent cris, soupirs et plaintes,
« Si bien doublés d’art infernal,
« Qu’on s’englue à mes douleurs feintes. »

— Ainsi le sexe féminin
Se dessine dans ma pensée :
Magique, doucereux, bénin,
Le cœur sec et l’âme glacée.

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La Pipe

Quand l’uniformité m’écœure,
Dans la rue ou dans la maison,
Que de fois pour nuager l’heure
Je savoure ton cher poison !

Ô ma coupe de nicotine,
Mon regard jubile en suivant
Ta fumée errante et lutine
Comme l’onde et comme le vent !

Quel doux philtre dans ces bouffées
Que j’aspire par ton cou noir !
Seul avec toi, je vois des fées
Dansant au sommet d’un manoir.

Humant ton odeur tabagique
Plus subtile que des parfums,
Au milieu d’un rêve magique,
J’évoque mes amis défunts ;

Et ma spectrale bien-aimée,
Avec son regard alarmant,
Sur tes spirales de fumée
Flotte mystérieusement.

Ton brouillard est l’escarpolette
Qui berce mes jours et mes nuits ;
Tu chasses comme une amulette
Mes cauchemars et mes ennuis.

Et je cuis mon dégoût du monde
Dans ton fourneau large et profond :
Je trouve l’homme moins immonde
En te fumant, l’œil au plafond.

Tu montres à ma fantaisie
Qui s’enveloppe d’un linceul,
Des horizons de poésie
Où le vers s’ébauche tout seul ;

Et pour moi ta saveur bénie,
Délicieuse d’âcreté,
Conserve en sa monotonie
Une éternelle nouveauté !

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Le mal de toi

Y a plus de soleil
Quand j´me réveille,
Matin chagrin
Quand j´ai le mal de toi.
Cassé la nuit,
Le jour ausi.
Plus faim, pas bien
Quand j´ai le mal de toi

Mais quand j´ai le mal de toi,
Je raconte n´importe quoi:
Que tu n´me manques pas,
Que j´t´attends pas,
Que j´ai des ailes,
Une vie nouvelle.
Sourire devant,
Souffrir dedans.
J´peux mentir comme ça
Quand j´ai le mal de toi.

Ton pull sur moi
Me donne moins froid,
Parfum qui r´vient
Quand j´ai le mal de toi.
T´écrire une lettre,
Partir peut-être.
Mourir, c´est rien
Quand j´ai le mal de toi.

Mais quand j´ai le mal de toi,
Je raconte n´importe quoi:
Que tu n´me manques pas,
Que j´t´attends pas,
Que j´ai des ailes,
Une vie nouvelle.
Sourire devant,
Souffrir dedans.
J´peux mentir comme ça
Quand j´ai le mal de toi

Et puis l´espoir, j´suis sûr de t´voir,
Demain, ce soir ou bien plus tard.
Je n´veux plus croire qu´on nous sépare
Quand j´ai le mal de toi.
Ça y est t´es là, j´entends ta voix.
J´ai l´cœur qui bat, tu cours vers moi.
T´es dans mes bras... J´délire comme ça
Quand j´ai le mal de toi.

Mais quand j´ai le mal de toi,
Je raconte n´importe quoi:
Que tu n´me manques pas,
Que j´t´attends pas,
Que j´ai des ailes,
Une vie nouvelle.
Sourire devant,
Souffrir dedans.
J´peux mentir comme ça
Quand j´ai le mal de toi.

chanson interprété par Francois FeldmanSignalez un problèmeDes citations similaires
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